L'ACHILLÉE MILLEFEUILLE : La maItresse du sang

L'ACHILLÉE MILLEFEUILLE  : La maItresse du sang

L'Achillée millefeuille est une grande plante médicinale, très commune dans nos contrées : c'est la plante de la  femme comme celle des jardiniers maladroits, car elle  peut calmer les saignements. Mais elle a bien d’autres utilisations : problèmes digestifs, problèmes de peau, fièvre, retour veineux, l’Achillée millefeuille est une vraie plante « joker », une de celles qu’il est bon de toujours avoir dans sa trousse à pharmacie familiale !

Aujourd'hui, nous allons donc vous parler de :
Botanique
Histoire
Culture et cueillette
Cuisine
Propriétés et utilisations
Symbolisme

BOTANIQUE

L'Achillée millefeuille (Achillea millefolium de son nom scientifique) est une plante vivace de la famille des Astéracées, qui pousse très facilement dans les zones tempérées de plusieurs continents (Europe, Asie, Amérique du Sud).
Son nom botanique Achillée a est une référence directe à une légende grecque qui dit que le célèbre héros Achille, qui avait appris l’art des plantes de guérison auprès du centaure Chiron, utilisa l’Achillée pour soigner les plaies et hémorragies de ses soldats lors de la Guerre de Troie : Homère raconte qu’en cas de blessure de flèche, il faut saupoudrer de la poudre d’Achillée dans la blessure après l’avoir nettoyée. C’est pourquoi on l’a nommée ainsi. Et le terme millefolium évoque l’allure générale de la plante, qui a des feuilles très fines, très découpées et très nombreuses, qui donnent l’impression qu’elle a mille feuilles !


De plus, selon les régions, elle porte un nombre impressionnant de noms communs, témoins de l’intérêt que lui portent les hommes depuis la nuit des temps : on l’appelle aussi Arbandine, Charpentaire, herbe à dinde, herbe aux charpentiers, herbe aux coupures, herbe aux militaires, Sourcils de Vénus, saigne-nez, herbe de la Saint-Jean, herbe à la saignée, herbe aux rêves, herbe de Saint Joseph, herbe de sang, queue-de-renard, queue-d’écureuil, Amour de 7 ans, Meûrisse… et j’en passe !


Son surnom d’Herbe de Saint Joseph lui vient de la légende suivante : Joseph, le père de Jésus, exerçait, comme on le sait, le métier de charpentier. Or, un jour, alors que Jésus, encore enfant, jouait à ses pieds avec le copeaux de bois, Joseph s’est blessé grièvement avec son rabot. Le sang coulait à flots et Jesus, ému par la souffrance de son père, couru cueillir quelques feuilles d’Achillée qui poussaient entre les pierres du chemin pour les appliquer sur la blessure de Joseph, qui cicatrisa immédiatement !


L'Achillée millefeuille est une plante pionnière, c'est-à-dire l'une des premières à repeupler un sol dépourvu de vie, notamment à la suite d'une exploitation abusive. Elle restaure l'équilibre des sols érodés, dans lesquels elle se propage par stolons. Si vous tirez sur sa partie aérienne, vous verrez apparaître des stolons rougeâtres, qui s’étendent en un réseau peu profond. Ces stolons permettent à la plante de coloniser de grandes zones.

Plante à tige peu ramifiée, elle mesure généralement de 60 à 80 cm, bien que certains spécimens puissent atteindre les deux mètres. Les tiges sont recouvertes de poils laineux et blanchâtres.
Les feuilles allongées de l'Achillée millefeuille sont de couleur vert foncé, et si finement découpées qu’elles donnent l’impression qu’elle a un nombre infini de feuilles sur sa tige. La floraison intervient entre juin et septembre : les capitules de fleurs de l'Achillée millefeuille sont de couleur blanche, rose ou pourpre et portent en leur coeur des fleurons blanc-jaune à jaune. Les sommités fleuries ressemblent à des ombelles, mais n’en sont pas, attention : ce sont des capitules floraux rassemblés en corymbes. Car l’Achillée millefeuille n’est pas une Ombellifère, mais une Astéracée. Elle a une odeur balsamique qui rappelle un peu celle du Chrysanthème.

La recherche médicale et pharmacologique moderne s’est peu intéressée à l’Achillée millefeuille. Cependant, on a découvert dans cette plante pas moins de 82 constituants !
l’Achillée millefeuille contient notamment : des composants aromatiques et volatiles (en particulier du chamazulène (bleu), camphre, linalol, sabinène, thujone, pinène, bornéol, etc.), dont on tire une huile essentielle bleue à cause du chamazulène, des composants amers (achillicine, etc.), des tanins, des flavonoïdes, des alcaloïdes, des coumarines et des acides phénoliques.
Ce sont des molécules qui cèdent leurs propriétés à l'eau et à l’alcool, on aura donc intérêt à utiliser l’Achillée sous forme d’infusion, mais aussi d’alcoolature, ou encore à la distiller pour en tirer une huile essentielle, qui permettront d’utiliser un spectre très complet des principes actifs de la plante.
De nos jours, l’Achillée millefeuille est réputée comme une plante médicinale majeure, qui fait partie des pharmacopées officielles de plusieurs pays européens et de l’Inde.

HISTOIRE

L’Achillée millefeuille servait déjà d’offrande pour accompagner les morts, il y a plus de 60 000 ans : en effet, on a retrouvé une trace de sa présence parmi des échantillons de pollen prélevés dans la tombe d'un homme de Néanderthal, au nord de l'Irak actuel.

De tout temps, l’Achillée millefeuille a été employée par les hommes, en Asie, en Europe et en Amérique du Nord. À peu près toutes les traditions populaires ont fait état de ses multiples propriétés antiseptiques, décongestionnantes, antispasmodiques, astringentes, cicatrisantes et coagulantes.
Dès l’antiquité grecque, elle a été mentionnée par Dioscoride et par Pline dans leurs écrits. discorde disait d’elle qu’elle était «d’une efficacité incomparable contre les plaies
saignantes, les ulcères anciens ou récents », et les Romains l’appelaient Herba militaris : à l’époque, on connaissait déjà son action vulnéraire, astringente et cicatrisante, et depuis ce temps-là, jusqu’au début du 20eme siècle, elle était employée par les soldats qui la ramassaient sur les champs de bataille, pour arrêter le sang des blessures, prévenir l’infection des plaies et en accélérer la cicatrisation, d'où son nom d'« herbe militaire ». Hippocrate la recommandait, en bains, contre les hémorroïdes saignantes.

De l’autre côté de l’Atlantique aussi, chez les Amérindiens de la tribu des Dakotas, on la surnommait « l’herbe des blessés » et dans l’est du Canada, les Algonquins l'utilisent encore pour soigner la fièvre et le rhume, entre autres maux. Elle a été utilisée depuis un temps immémorial pour arrêter toutes sortes d’hémorragies, celles des soldats comme celles des femmes aux règles trop abondantes, mais aussi pour soigner les hémorroïdes d’après Hildegarde de Bingen, ou les fièvres intermittentes en Italie où le paludisme faisait rage alors. Pendant la 1ère Guerre Mondiale, elle faisait partie de la trousse de première urgence que l’on donnait à chaque Poilu avant son départ au Front.

Mais on l’appelait aussi « Herbe aux soldats » pour une autre raison ; parce qu’elle avait la réputation de rendre courageux et de supprimer la peur ! C’est pourquoi les soldats s’en bourrait les poches et les chevaliers du Moyen-âge en liaient un bouquet à leur lance lorsqu'ils partaient affronter dragons et ennemis !

C'était la plante préférée des herboristes saxons médiévaux : les Highlanders d’Écosse en faisaient un onguent pour les blessures, car ils la considéraient comme une grande plante médicinale, mais aussi comme une plante sacrée, à traiter avec beaucoup de respect (capable d’aider à guérir un homme gravement blessé… ou de l’aider à mourir en paix et à gagner le paradis) ! Ils pensaient aussi que l’Achillée millefeuille aidait les princes à mieux assumer leurs devoirs et protégeait contre les sorts malveillants. Elle a donc acquis une solide réputation d’herbe magique, qui se retrouve dans de nombreuses utilisations folkloriques de par l’Europe, notamment lors des rites de la Saint Jean : on la cueillait au moment du Solstice d’été, puis on en plaçait un bouquet au-dessus de la porte pour protéger la maison du mauvais oeil et de la mort, jusque’à l’année prochaine.


En Gironde, les paysans avaient pour habitude d’en porter une tige fraîche sous leurs vêtements pour se protéger des sorciers, et en Vendée, on l’utilisait dans les rituels d’exorcisme, c’est dire la puissance qu’on lui prêtait ! En Italie, c’était aussi une plante liée à l’amour : on l’utilisait pour en faire des philtres et des charmes d’amour, et le soir du mariage, on suspendait on bouquet d’Achillée à la tête du lit de noces, pour l’y laisser sécher, afin d’assurer aux époux un amour fidèle et sincère d'au moins sept ans (d’où son nom d’ « Amour de 7 ans »).

Chez les peuples germaniques qui l’associaient à la Déesse Freya, protectrice des femmes et du foyer, l'Achillée enseignait aux femmes à respecter leurs cycles de vie et veillait sur elles tout au long de leur existence.


En Asie, si l’Achillée millefeuille était un ingrédient important de la médecine traditionnelle chinoise, il était aussi utilisé pour la divination : en effet, c’est avec 50 tiges d’Achillée millefeuille que les astrologues faisaient leurs tirages de Yi-King, le fameux Livre des Transformations de l’empire du Milieu. Cette technique s’appelait aussi achilléomancie. Si les tirages restent d’actualité, de nos jours, les tiges d’Achillée ont laissé place aux pièces de monnaie ou baguettes de bambou.
Fait étonnant, l’Achillée servait aussi aux guidances chez les Celtes européens  : ils gravaient des oghams (symboles rattachés à des lettres, intentions et végétaux) sur des tiges d’Achillée qui faisaient office d’oracles, en particulier pour les divinations liées à l’amour (encore !).
On a identifié qu’il y avait depuis très longtemps des relations entre ces régions extrêmement distantes : des centaines de momies de l'âge du Bronze ont été découvertes dans l'ouest de la Chine avec des vêtements (dont des jambières en tartan) et de l'ADN les reliant aux terres celtes. Cependant, on pense l'utilisation de cette même plante pour la divination est plus probablement due au hasard.

On brûlait aussi les tiges séchées, comme des bâtons d’encens.
On l’utilisait aussi sur le plan culinaire : son amertume caractéristique en a fait un ingrédient de choix pour la composition de nombreuses préparations toniques, comme des vins et des alcools aromatisés. De plus, l’Achillée aide à la conservation du vin ! Et oui, autrefois, on en mettait un sachet de graines dans le fond des tonneaux, pour empêcher le vin de tourner. Toujours mieux que le sulfite, non ?
Dans les pays nordiques, l’Achillée remplaçait le houblon dans la fabrication de la bière et de la cervoise, qui devenait alors particulièrement enivrante.


Enfin, il y a à peine 50 ans, tous les enfants des campagnes savaient bien comment utiliser l’Achillée pour obtenir de sécher l’école : ils se ramonaient vigoureusement les narines avec des tiges d’Achillée bien dures pour se faire saigner abondamment le nez, pour obtenir de quitter l’école. Puis, sur le chemin du retour, ils utilisaient les feuilles d’Achillée pour stopper l’hémorragie et profiter de l’école buissonnière ! Chez certaines personnes sensibles, il suffit même de renifler fortement de l’Achillée pour provoquer les saignements de nez. Mon grand-père l’a fait plus d’une fois dans sa Provence natale… et il n’est pas le seul, demandez à vos grands-parents ;)


CULTURE ET CUEILLETTE

On peut utiliser les feuilles jeunes et les racines, mais ce sont les fleurs qui sont les plus convoitées, car les plus riches en composants actifs. D’autant plus qu’une fois mature, la feuille sèche devient très cassante, et se décompose rapidement.
On ramasse donc les sommités fleuries, c’est-à-dire les jeunes feuilles d’un vert plus tendre et les fleurs.


Vous pouvez cultiver l’Achillée, tout comme en faire la cueillette sauvage, mais l’important est de ramasser celles qui dégagent l’odeur la plus forte. Certains herboristes font une différence entre Achillée rose ou blanche, mais ce sont des arguties d’intellectuel : la qualité de votre Achillée dépend de sa puissance aromatique  : la plante doit sentir l’Achillée et avoir un gout d’Achillée ! Quelle que soit sa couleur, elle vous rendra service si elle est bien aromatique, amère et puissante.


Or, on observe que l’Achillée millefeuille poussant sur des sols riches (aux abords des fermes, dans les champs cultivés, etc.) a beaucoup moins de parfum que celle poussant sur des sols pauvres et compactés : la plante poussant sur sol pauvre sera donc beaucoup moins haute et luxuriante, mais beaucoup plus puissante. Vous l’avez compris : si vous plantez l’Achillée dans votre jardin, ce n’est pas la peine de lui réserver un coin d’humus riche et gras. Au contraire, c’est souvent sur un sol pauvre, rocailleux et compacté qu’on trouve la meilleure Achillée millefeuille !


La plante perdra peu à peu de son parfum au séchage, mais se conserve relativement bien pendant au moins 12 mois : on la garde dans des placards, au frais et à l’abri de la lumière. Au-delà d’un an, ne la jetez pas d’office, bien sûr : elle ne sera pas peut-être plus de qualité optimale mais elle garde encore son parfum, ce serait dommage de la jeter… 


CUISINE

On utilise peu l’Achillée en cuisine : la racine fraîche a une odeur de camphre, les fleurs et les feuilles ont une odeur aromatique, certes, plutôt agréable, mais une saveur un peu amère, astringente et piquante. Pas fou fou, donc… A savoir : les fleurs sont plus aromatiques que les feuilles.

On peut utiliser les très jeunes feuilles d’Achillée dans les  salades, ou cuites à l’eau et sautées rapidement au beurre comme on le fait en Angleterre, ou en condiment (hachées comme dues feuilles de persil), ou alors les fleurs crues en décoration ou pour parfumer les desserts, mais sinon, l’Achillée  sert surtout d’ingrédient dans les recettes de vins et alcools aromatisés toniques, comme on l’a dit précédemment.

PROPRIÉTÉS ET UTILISATIONS

C’est surtout sur le plan médicinal que l'Achillée millefeuille est utilisée : elle contient beaucoup de minéraux et elle active le métabolisme général. De tempérament asséchant, et réchauffant et rafraichissant à la fois, on la surnomme « la maitresse du sang »  car elle favorise une bonne circulation du sang et réduit la tension artérielle, grâce à sa richesse en coumarines, notamment. Elle est aussi riche en flavonoïdes, on l’a vu, et c’est une plante astringente, qui resserre les tissus auxquels elle redonne de la structure (pensez aux tiges bien raides de l’Achillée !), notamment aux veines, et aux muqueuses flasques ou enflammées sur lesquelles elle aura un effet asséchant.

Elle est donc idéale pour tout ce qui touche aux menstruations et au cycle hormonal, on va le voir, d’où sa réputation de « plante des femmes ». Antiseptique, antispasmodique, diurétique, fébrifuge, tonique amère, digestive, et hormon-like, l’Achillée millefeuille va avoir de très nombreux emplois, dans différentes sphères  physiologiques, qui justifient son surnom de « plante-joker ».

1/ Sphère cutanée et circulatoire :

Nos anciens avaient bien raison : grande circulatoire, anti-infectieuse, anti-inflammatoire, hémostatique et cicatrisante, l’Achillée millefeuille est une grande alliée en cas de coupures, de saignements et de blessures !
Elle agit notamment sur les facteurs de coagulation et le contrôle neurovasculaire et protège les tissus contre le stress oxydatif grâce à ses flavonoïdes.

C’est une des meilleures plantes hémostatiques que nous ayons dans notre pharmacopée naturelle : elle a la capacité d’arrêter les saignements abondants, et elle permet de réguler les flux de sang des profondeurs vers la surface, en aidant les artères à aspirer le sang qui s’est répandu dans les tissus à partir d’un vaisseau déchiré.

De plus, elle est très riche ne potassium et en soufre, matériaux importants pour la genèse du sang : on l’utilisera donc avec bonheur dans tous les cas de plaies avec saignement, que ce soit en interne ou en externe, pour stopper les saignements et aider à la ciactrisation.

Si on est dans la nature, on peut tout simplement ramasser quelques feuilles, les mâcher et appliquer ce cataplasme de plantes et de salive directement sur la blessure. C’est la plante à connaître en cas d’urgence pour les randonneurs ou les campeurs !
D’après l’expérience herboristique, elle est efficace même en cas de coupure jusqu’à l’os, donc profonde et sévère. Ce genre de cataplasme est aussi très efficace en cas d’ampoule de sang, qui apparaît après un choc.


Traditionnellement, on l’utilisait aussi en cas de saignement interne (saignements pulmonaires dus à la tuberculose, saignements dues à des néphrites), même si la bourse-à-pasteur rendra souvent plus de service dans ces cas-là. Dans ce contexte hémostatique, l’Achillée millefeuille mérite bien sa réputation de plante « asséchante".

En cas de coups et d’ecchymose qui s’éternise, de couleur bleue/violette/noire, l’Achillée est aussi d’une grande aide car elle va stimuler la circulation au travers des veinules et capillaires et va permettre un meilleur échange de liquides pour remonter et éliminer le sang coagulé à l’intérieur et l’évacuer plus facilement (elle ramène les fluides et dans ce contexte-là, l’Achillée est plutôt humidifiante et réchauffante)… En fait, l’Achillée est plus efficace en cas de coupure ou d’hématome d’origine violente (la plante des guerriers, vous vous souvenez ?), et l’arnica aux hématomes, ou foulures plus légères : l’Arnica s’utilise dans les 2 jours juste après le choc, l’Achillée prendra la relève si le corps a du mal à résoudre le problème tout seul.


C'est aussi "une plante à tout faire" pour les maladies de peau : éruptions, eczéma, blessures qui suintent : l’Achillée protège le sang et la peau : elle stoppe les écoulements vers l'extérieur et empêche des flux inutiles ou nocifs de forcer la barrière de la peau.

Antibactérienne et antifongique, c’est un tonique actif qui purifie la peau et fait aussi barrière contre toutes les substances allergisantes qui peuvent venir de l’extérieur. Anti-inflammatoire, elle calme aussi les démangeaisons, ce qui en fait une alliée intéressante en cas d’eczéma allergique, par exemple (en infusion, mais aussi en macérât huileux en externe).


De plus, l’Achillée millefeuille est une plante astringente et un bon tonique veineux, qui améliore les échanges au travers des capillaires et des veinules (c’est donc une plante « réchauffante »). On l’utilise donc pour améliorer le retour veineux en cas de jambes lourdes, dans le traitement des hémorroïdes, surtout anciennes, ou en prévention des phlébites ou des varices, soit en interne (infusion, alcoolature), ou en externe (macérât huileux). Attention, utilisation externe seulement si pendant la grossesse, mais on va y revenir ! On l’associe avec succès au noisetier, au marron d’Inde ou à la vigne rouge.



2/ En cas de fièvres et brulures :

L’Achillée va se montrer très intéressante en cas de fièvre ou de brulure : dans ce genre de cas, elle va avoir un tempérament rafraichissant, et non réchauffant (hé oui, l’Achillée, c’est l’équilibre des contraires !).

L’Achillée est donc une bonne plante pour faire baisser la fièvre : elle favorise la transpiration, donc elle est particulièrement indiquée chez les fiévreux dont la peau  est chaude, tendue et sèche, et qui ont du mal à transpirer.


L’Achillée est particulièrement indiquée pour les personnes au tempérament sanguin, ayant le visage rouge (ce qui dénote une certaine congestion à la tête), une difficulté à trouver le sommeil ou le calme : dans ce cas, l’Achillée rendra la peau souple et humide et calmera la personne. On la préconise donc aussi en cas de grippe ou bronchite, d’autant plus qu’elle est puissamment anti-inflammatoire est qu’elle contient des huiles essentielles et des principes amers qui stimulent les muqueuses des voies respiratoires.


L’Achillée est aussi particulièrement indiquée dans les cas de fièvre/infection causant une hémorragie, forcément. Elle peut même être utilisée chez l’enfant fiévreux, pour lequel elle est plus efficace que la fleur de sureau. C’est la fleur en infusion chaude, qui sera utilisée idéalement dans ce genre de contexte.


De même, quand la peau est soumise à des radiations et qu'elle brûle, il faut toujours penser à l’Achillée, pleine de potassium (qui rafraîchit et limite la montée de la fièvre, et régit l’activité de l’adrénaline qui procède aux défenses de l'organisme agressé), et de soufre (intermédiaire entre le fer et les protéines aide à la réparation des tissus, et des nerfs en favorisant la construction des globules blancs) : cette plante excelle en cas de brulure par radiothérapie ou pénétrant en profondeur, car elle rafraichit et répare à la fois.
Son effet sur la fièvre et la peau va aussi permettre de soutenir les reins, car lorsque ceux-ci sont fatigués, la peau peut aider à éliminer certaines substances par sudation : aussi, une plante comme l’Achillée, qui favorise la circulation périphérique et la transpiration, peut soulager des reins malades. De plus, c’est une plante très diurétique et antiseptique des voies urinaires, qui peut donc s’avérer utile dans les cas de cystites.


Pour lutter contre la fièvre, on peut utiliser l'Achillée millefeuille en association avec le sureau, la menthe poivrée et la cataire, notamment.


3/ Sphère génitale féminine :


C’est justement parce que l’Achillée millefeuille a une grande affinité pour le sang qu’elle joue un rôle majeur dans la régulation des cycles féminins : elle relance la circulation sanguine, elle soutient le foie qui est responsable du nettoyage du sang et de la dégradation des hormones en excès, elle décongestionne l’utérus et le petit bassin, car c’est une grande antispasmodique des muscles lisses, et en plus l’Achillée rééquilibre les niveaux de progestérone dans le corps (par son action au niveau hépatique et par la présence de phytostérols à action progestative). C’est ce qu’on appelle une plante « progestérone-like », qui permet de réduire l’excès d’oestrogènes en circulation dans l’orgasnisme.


Du coup, on va pouvoir l’utiliser pour une infinité de problèmes féminins, des plus simples aux plus complexes. Elle est excellente pour l’aménorrhée, passagère (due au stress par exemple) ou chronique (dans ce genre de cas, prendre une ou deux tasses d’infusion par jour jusqu’à ce que les règles démarrent).

Mais aussi en cas de règles douloureuses, en particulier lorsqu’il y a des crampes, ou des écoulement avec de petits caillots. En cas de règles trop abondantes, son action anti-hémorragique sera précieuse, et on l’utilise aussi application locale (bains de sièges) en cas de pertes blanches. en fait, elle fonctionne dans les deux sens ; elle réduit les saignements excessifs et fluide le sang stagnant !


Elle est aussi utile lorsque de petits saignements persistent au bout de 5 ou 6 jours de règles et en cas de saignement post-partum. Maria Treben, célèbre herboriste autrichienne du 20eme siècle, la recommandait autant aux jeunes filles aux règles irrégulières qu’aux femmes en préménopause dont l’Achillée compense la carence hormonale, et réduit ainsi les symptômes désagréables, bouffées de chaleur, règles hémorragiques, manque de libido…

On peut l’utiliser sous forme de poudre de plante, de tisane ou d’alcoolature. Quand il faut rééquilibrer le féminin, on l’utilise en général sur la seconde partie du cycle, 15 jours par mois.  
En médecine chinoise, on l’utilise dans tous les cas de fibrome utérins, qui sont considérés comme un cas de « sang stagnant », qui encombre le système et devient source de maladie.

En médecine amérindienne aussi, on retrouve cette idée que le sang des menstruations doit être complètement rejeté, sinon il finit par produire des adhérences et des douleurs. Et les médecins amérindiens utilisaient précisément l’Achillée dans ce but.
Ce qui est étonnant, c’est que cela rejoint complètement l’utilisation qu’on en fait en Europe dans les protocoles conçus pour soulager l’endométriose : son action anti-inflammatoire sera intéressant pour soulager les douleurs, mais la plante aura aussi un effet équilibrant hormonal subtil sur le long terme, pour rééquilibrer les taux d’oestrogènes et de progestérone, surtout en association avec le Gattilier (pour une action lutéale plus prononcée). C’est une plante majeure dans ce genre de problématique.



4/ Sphère digestive :


Le foie et le sang sont intimement reliés : le foie filtre le sang et le nettoie, le sang irrigue le foie et le nourrit. L’Achillée millefeuille, plante maitresse du sang, est au coeur de ces deux processus, elle a donc forcément une affinité avec la sphère digestive !!


Déjà, c’est une plante « réchauffante », tonique amère, et en tant que telle, elle orchestre la relâche des différents sucs digestifs quand elle est prise avant les repas, ce qui permet de faciliter les digestions paresseuses et soulager les remontées acides. On peut aussi la prendre après les repas, elle calme les crampes, réduit les fermentations, et stimule la digestion dans son ensemble. On l’utilise aussi en cas de diarrhées, notamment chez l’enfant, ou en cas de colite spasmodique ou d’intestins enflammés.


Surtout, l’Achillée millefeuille améliore la circulation du sang à travers le foie et la veine porte, ce qui permet d’assurer une meilleure assimilation des nutriments. Elle est donc recommandée pendant les périodes de faiblesses, d’asthénie générale, de dénutrition. En favorisant une meilleure circulation sanguine, cette plante permet de soulager les organes congestionnés (c’est-à-dire trop pleins de sang, à cause d’une inflammation, d’une sursollicitation ou d’une stagnation).


Le foie qui est un organe très vascularisé, et qui est souvent très (trop) sollicité aujourd’hui est particulièrement sujet à la congestion. Quand il est douloureux, suite à des excès type abus d’alcool, de viandes et graisses animales et de fêtes en tous genres, l’Achillée peut se révéler une hépatoprotectrice très utile. On peut l’utiliser en interne, sous forme d’infusion ou d’alcoolature, ou en externe, en compresses tièdes d’infusion de la plante sur la région du foie, soulageant la congestion et le gonflement de l’abdomen. En cas de maladie hépatique chronique, la compresse doit être appliquée en milieu de journée, c’est plus efficace en terme de chronobiologie. On l’utilise aussi en alcoolature, pour rééquilibrer le métabolisme des graisses et réguler le cholestérol (vingt-cinq gouttes dans un peu d'eau et boire rois fois par jour).


On l’utilise aussi pour perdre du poids et pour éliminer les déchets : en tisane, deux à sept grammes de plante sèche par jour. NB : encore mieux si on prépare l’infusion à la manière chaude classique, mais qu’on la boit une fois refroidie seulement. Ce sera plus stimulant pour la digestion et les reins.
(En cas de turista, si on a une diarrhée de couleur jaune/verdâtre, ce qui signifie que le foie libère une grande quantité de bile, l’Achillée est une très bonne indication !)


Au passage, on remarquera que le foie et la peau étant extrêmement connectés, lorsque le foie n’arrive plus à évacuer les déchets, c’est la peau prend la relève, ce qui crée des problèmes d’inflammation cutanée diverses (dermatoses, eczéma, etc.). Voilà pourquoi l’Achillée, plante stimulante du foie, cholagogue et cholérétique, est aussi une bonne plante pour la peau comme on l’a vu plus haut…


5/ autres utilisations :

On utilise aussi traditionnellement l’Achillée en cas de rage de dents, de dent cassée ou de carie douloureuse, en attendant d’aller chez le dentiste. Dans ces cas-là, on prend plutôt une alcoolature concentrée de plante fraîche (quelques gouttes pures sur la dent douloureuse), pour endormir la douleur et calmer l’inflammation.
On sait aussi que son huile essentielle est très efficace en cas d’infection à Candida albicans.

L’Achillée est aussi une des rares plantes à être réellement efficace en cas d’hypertension essentielle : elle fluidifie le sang et décongestionne certains organes. Ainsi, le sang circule mieux, retrouve plus d’espace, et l’hypertension se relâche…
En fait, elle améliore les fonctions cardiaques par son action circulatoire, et non pas directement comme l’Aubépine, par exemple. Maurice Mésségué la recommandait pour les personnes sujettes aux angines de poitrine, ou à celles souffrant de douleurs dans le thorax.
Elle soulage aussi les migraines avec congestion à la tête.

Au niveau psychologique, l’Achillée est le remède du « guérisseur blessé » : celui qui éteint l’incendie mais se blesse lui-même au passage, ou qui a tendance à se sacrifier pour aider les autres, mais se retrouve blessé émotionnellement, que ce soit un soignant ou bien une personne sensible et fragile, facilement blessée par le regard ou les commentaires des autres. On utilise alors idéalement l’élixir floral pour traiter ce genre de problèmes.


6/ Précautions et contre-indications :

Certains composants de l’huile essentielle d’Achillée sont neurotoxiques et abortifs, donc faire bien attention quand on utilise l’HE (comme toujours !). De plus, c’est une plante tonique utérine, donc l’Achillée est contre-indiquée pour les femmes enceintes et allaitantes, et chez les jeunes enfants.


L’Achillée millefeuille peut aussi provoquer des réactions allergiques cutanées chez les personnes sensibles aux plantes de la famille des Astéracées (marguerite, aster, camomille, pissenlit, etc). elle peut aussi être photosensibilisante à très hautes doses. Mais très peu de contre-indications, dans l’ensemble.

SYMBOLISME

L’Achillée symbolise avant tout la Protection !
Ce petit parapluie de fleurs qui pousse dans la nature nous aide à maintenir nos frontières, qu'elles soient physiques, émotionnelles ou spirituelles. Elle crée des poches de protection personnelle pour nous permettre de ralentir, de rassembler nos forces et de nous armer de courage. Elle représente la frontière entre l’intérieur et l’extérieur, qui  nous aide à instaurer notre espace personnel, notre bulle sacrée. Elle nous questionne sur ce que nous souhaitons ou refusons de laisser passer, dans un sens ou dans l’autre, et nous aide à réfléchir à notre perméabilité et notre affirmation de nous-mêmes. Osez dire oui ou non, vous êtes sous la protection de l’Achillée…

L’Achillée représente aussi l’Équilibre intérieur, l’harmonie entre Yin et Yang, à la fois de nature chaude et froide, associée au Dieu Cornu comme au féminin sacré, à la fois tige rigide et feuilles délicates,  cette plante réconcilie les éléments opposés à travers elle, elle qui a la capacité à ramener une fonction physiologique vers « le milieu », que celle-ci soit déficiente ou excessive… C’est la plante de la voie médiane.

Enfin, l’Achillée nous enseigne la Patience : sa croissance est lente et concentrée. Tout comme  la progestérone prépare la nidation, l’Achillée nous apprend l’importance de retourner dans le nid de nos terres intérieures, pour en prendre soin et les nourrir, afin d’accoucher de notre vocation profonde : c’est la plante de la maturation et de l’intériorité, qui nous aide à acquérir une vision beaucoup plus large et sereine de notre vie au sein des cycles naturels.

Héroïne, guérisseuse, philosophe, une plante-joker, quoi !!



Références/sources :
Jean-Yves Dionne, pharmacien
Du bon usage des plantes qui soignent De Jacques Fleurentin
Petit Larousse des plantes médicinales De Gérard Debuigne et François Couplan
Fournier, Paul-Victor, « Dictionnaire des Plantes Médicinales et Vénéneuses de France
Valnet, Jean, « La phytothérapie : Se soigner par les plantes »
Christophe Bernard  Althea Provence
Maïa Toll, auteure de L'Herbier du chaman
LuminessensLe Petit Larousse des plantes qui guérissent, de François Couplan et Gérard Debuigne
Traité d’herboristerie énergétique de Matthew Wood
Du bon usage des plantes qui soignent de Jacques FLeurentin
claudine Luu, herboriste et praticienne MTC 300 plantes médicinales
Secrets d’une herboriste Marie-Antoinette Mulot
Anne Vastel, plantes occidentales et médecine chinoise