Vous ne trouverez certainement pas de Fumeterre dans des jardins bien entretenus : on la considère en général comme une mauvaise herbe. Pourtant cette plante très commune sous nos latitudes tempérées était bien connue des Anciens qui en connaissaient les grandes propriétés médicinales, notamment pour son soutien à la fonction hépatique, et pour son action contre les affections dermatologiques. Une grande dépurative aux talents bien cachés, à redécouvrir…
BOTANIQUE
Le nom latin de la Fumeterre est Fumaria officinalis : c’est une plante herbacée qui appartenait à la famille des Fumariacées jusqu’en 2009, année ou la classification phylogénétique des plantes l’a intégrée de la famille des Papavéracées. C’est donc une cousine du Pavot et comme toutes les plantes de la famille des Papavéracées, elle contient de nombreux alcaloïdes, par contre, c’est la seule Papaveracée à ne pas présenter de latex à la cassure (ce qui est une indication caractéristique de cette famille).
On pense que le Mot Fumeterre vient du latin fumus et de terra, terre, certainement en référence à l'odeur de fumée qui se dégage de la plante et au léger goût fumé qu’elle laisse en bouche, et à son apparence légère, aérienne et grisâtre qui pourrait donner une impression de vapeur ou de fumée lorsqu’on la regarde de loin.
Une ancienne croyance disait que la Fumeterre naissait non d’une graine mais des vapeurs de la terre elle-même !!
Comme toutes les grandes médicinales, elle dispose d’un grand nombre de noms communs : fumée de terre, fiel de terre, herbe-à-la-jaunisse, fleur de terre, herbe à la veuve, pied de géline, raisinette (en référence à la couleur de ses fleurs), chausse rouge, lait battu, pisse-sang.
Originaire d’Europe et d’Afrique du Nord, la Fumetetre est une plante herbacée annuelle mesurant 50 centimètres de haut environ, qui est très commune dans les régions tempérées d’Europe, d’Afrique du nord et en Asie occidentale, tout particulièrement dans le bassin Méditerranéen.
Elle aime pousser sur des sols calcaires ou argilo-calcaires, pas trop secs, dans les champs, sur les terrains vagues, au bord des chemins, sur les talus, dans les vignes ou bien encore dans les ruines, au soleil ou à mi-ombre, jusqu’à 1500 m d'altitude.
C’est une plante qui possède une racine pivotante, une tige frêle et molle qui se couche donc facilement, au moindre coup de vent ! Elle s’appuie volontiers sur d’autres plantes qui lui permettent d’atteindre plus facilement la lumière.
Elle porte des petites feuilles alternes, de couleur vert-gris et sans duvet. Les fleurs sont disposées en épis terminaux, avec plus de 15 fleurs par épi. Elles se présentent en forme de tube allongé et se terminent par un éperon, d’une jolie couleur allant du rose au pourpre, qui apparaissent d’avril jusqu’à la fin de l’été.
Les fruits de la fumeterre sont des petites siliques globuleuses renfermant chacun une seule graine. L’ensemble de la plante a une saveur amère.
La Fumeterre contient beaucoup de molécules intéressantes sur le plan physico-chimique, notamment des alcaloïdes (protopine et fumarine, principalement), des acides-phénols, des flavonoïdes (quercétine), des composés amers, des minéraux comme les sels de potassium et des tanins.
HISTOIRE
Connue depuis l’Antiquité, la Fumeterre était recommandée pour les affections hépatiques, notamment par Pline et Galien. Elle était également utilisée pour les affections cutanées, la gale et le prurit. Le médecin Avicenne lui attribue de nombreuses vertus, dont le pouvoir de guérir les maladies des yeux et les dartres du visage.
Au Xe siècle, ce sont surtout les médecins arabes qui vantent les vertus de la plante, car en Occident, elle progressivement été oubliée à partir du Moyen Âge.
Comme plante médicinale, en tout cas, car on continuait à l’utiliser en tant que plante magique : en Occident, la Fumeterre fut brûlée pendant de longs siècles pour exorciser les lieux maudits ; l’importante fumée qu’elle dégage en se consumant était utilisée selon les cas et les régions, pour invoquer l'âme des morts, pour se rendre invisible, pour éliminer les influences négatives et les peurs, ou encore pour conjurer les désastres voire éloigner les voleurs de lait.
Et dans le Pas-de Calais, avant d’aller demander une augmentation à son patron, on avait pour coutume de cirer ses chaussures avec une décoction de Fumeterre !
Puis, les hommes recommencent à s’intéresser aux propriétés médicinales de la Fumeterre à partir du XVIème siècle : le médecin Pierre-André Matthiole, l’un des plus célèbres botanistes de son temps, ne tarit pas d’éloges sur la Fumeterre en cas de troubles digestifs. On l’utilise aussi de plus en plus pour ses vertus dépuratives et son action bénéfique sur les problèmes de peau, qui sont alors officiellement reconnues.
Elle fut même considérée par nos Anciens comme une des plantes les plus efficaces pour atteindre l'âge de 100 ans : avec l’angélique et le frêne, elle fait partie de ces Simples qu’on appelait « les remèdes des centenaires ».
Plus récemment, au XXème siècle, la Fumeterre est recommandée en cure chronique pour traiter l'obésité et sur de courtes durées pour ses effets sédatifs, et son usage est reconnu par l'Agence européenne des médicaments.
CULTURE ET CUEILLETTE
La fumeterre est une plante qui ne se trouve pas en jardinerie, généralement. Si vous souhaitez l’utiliser, il faut donc soit la cueillir, soit faire germer des graines que vous aurez récupérées.
La Fumeterre est une des premières plantes à pointer son nez après les mois d’hiver, elle fait partie de celles qui annoncent l’arrivée de la saison claire : elle fleurit généralement dès le mois de février ou mars et elle n’apprécie pas les grosses chaleurs, elle a donc tendance à disparaître vers la fin du printemps selon les régions.
En phytothérapie, on utilise la sommité fleurie de la fumeterre : donc, pour avoir une meilleure concentration en principes actifs, on la récolte généralement entre février et avril, pendant la floraison qu’on écourte un peu.
Attention, la Fumeterre est une plante fragile aux racines petites : on risque facilement de l’arracher entièrement, racines comprises, en voulant tirer sur une branche pour en prélever un échantillon, donc soyez prudents ! Décidément, elle est aérienne et fragile comme une fumée, de la racine aux fleurs…
Si vous souhaitez la cultiver, elle peut être semée en pleine terre ou en terrine, sur tous les types de sols, en plein soleil ou à mi-ombre. Les graines de fumeterre doivent être semées lorsqu’il fait froid car elles ont besoin de stratification à froid. Vous pouvez également mettre vos graines au réfrigérateur pendant quelques semaines avant le semis. Il faut attendre 1 à 2 semaines pour voir les graines germer.
La Fumeterre requiert peu d’entretien. Par contre, pensez à les planter bien serrées pour qu’elles puissent s’appuyer les unes contre les autres, pour compenser sa tige molle et fragile. Vous pouvez également les laisser s’allonger d’autres plantes voisines comme le romarin, avec lequel elle s’entend bien.
L’arrosage est indispensable en été, notamment en cas de fortes chaleurs et de sécheresse. La fraîcheur permettra à la plante de fleurir de nouveau en septembre.
Par contre, la Fumeterre craint les pucerons et les fourmis qui peuvent la coloniser.
Une fois séchée, elle se conservera très bien pendant au moins un an, mais attention : elle a tendance à reprendre l’humidité, gardez-la donc dans une pièce qui ne soit pas trop humide.
CUISINE
On n’utilise pas la Fumeterre en cuisine : c’est une plante qui possède une odeur âcre et une saveur très tannique, amère et salée, peu agréable pour les papilles.
A noter : l’infusion préparée avec la plante fraîche est moins amère qu’avec la plante une fois séchée.
On a bien retrouvé quelques recettes de Vin Médicinal, préparée par décoction de la plante dans vin blanc, mais c’est tout.
Définitivement, c’est une plante dont le principal intérêt pour l’homme est médicinal.
PROPRIÉTÉS ET UTILISATIONS
Les herboristes ont pour habitude de dire de la Fumeterre qu’elle a un tempérament Refroidissant, Asséchant, et légèrement Calmant, lié à ses composants essentiels dont on a parlé tout à l’heure, et dont on retrouve la signature dans son goût.
Son amertume signe son côté refroidissant, qui calme les conditions et les tempéraments enflammés. Son aspect tannique va, quant à lui, légèrement raffermir les tissus et muqueuses, digestives en particulier, et l’astringence qui en découle la rend donc asséchante. Enfin, l’âcreté de son goût est un signe de son effet calmant (n’oubliez pas qu’elle appartient à la famille du Pavot…).
1/ Avant tout, la Fumeterre est une très puissante plante digestive :
apéritive et tonique, elle stimule et facilite la digestion, et elle apporte de l'énergie en cas de fatigues intenses et physiques.
En effet, les composants amers de la fumeterre vont déclencher une sécrétion de sucs gastriques et une fortification des contractions des muscles lisses. Dans ce genre de cas , on prendra la Fumeterre en infusion 15 minutes avant le repas, en petite quantité.
Car c’est l’amertume que ressentent vos papilles gustatives qui va créer la cascade enzymatique qui va permettre de lancer votre digestion. Si l’on absorbe la Fumeterre broyée en gélules par exemple, ou en ajoutant du sucre ou du miel pour adoucir l’infusion, l’effet sera grandement diminué, voire inexistant !
Au regard de ces propriétés, la Fumeterre va donc être intéressante pour tous les troubles de la digestion, spasmes digestifs, ballonnements gastriques, digestion lente, éructations, nausées, vomissements, altération de l’appétit et somnolence postprandiale (après le repas), reflux gastriques ou encore migraines digestives.
Pour les états migraineux d’origine nerveuse et hépatique, on conseille d’associer la Fumeterre avec le Romarin, la Matricaire, la Mélisse et la Primevère (une tasse avant les repas en cure de 21 jours).
2/ Surtout, elle soutient les fonctions hépatobiliaires :
la Fumeterre est même LA grande plante de la vésicule biliaire. En effet, c’est une plante à la fois cholagogue et cholérétique, comme le Romarin ou le Radis noir. Mieux, elle régule la sécrétion biliaire : on dit que la Fumeterre est amphocholérétique, ce qui signifie qu'elle régularise le flux biliaire en l'augmentant quand il est insuffisant, et en le réduisant quand il est trop important. On pense que ce sont ses alcaloïdes dont la fumarine, qui expliquent ses effets cholérétiques, et ses acides organiques, dont l’acide fumarique, qui participent à la régulation de la sécrétion biliaire.
On a aussi démontré qu’elle a une grande propriété antispasmodique en particulier en niveau du sphincter d'Oddi, le canal qui contrôle l'évacuation de la bile provenant de la vésicule biliaire, grâce à sa protopine. Or, ce muscle est très souvent sujet à des spasmes, à cause de problèmes biliaires ou de prise de médicaments contenant des opiacés, comme a Codéine. Ce qui peut causer des douleurs abdominales très aiguës. La Fumeterre est une plante très adaptée dans ce genre de cas.
On peut trouver ça étonnant, puisqu’on a dit tout à l’heure que la Fumeterre permet de tonifier les muscles lisses du système digestif : si elle les tonifie, comment peut-elle calmer les crampes de l’autre côté ? Ca peut paraitre contradictoire… On pense à l’heure actuelle qu’une des raisons de ces spasmes du Sphincter d’ordi provient du fait que le système digestif ne fabriquant pas assez de sucs gastriques, les muscles du système vont travailler plus vite et plus fort pour compenser, mais de manière inefficace, ce qui amène à la crampe. Dans ce genre de cas, la Fumeterre, en permettant une meilleure sécrétion de sucs, permet aux muscles lisses de travailler plus efficacement, mais moins fort ! C’est pour cela qu’on considère qu’elle est à la fois tonique et antispasmodique (et donc régulatrice) des muscles lisses digestifs.
Ainsi, d’après la Commission E allemande (un comité d’experts en plantes médicinales chargé d’apporter des preuves de leur efficacité), c’est parce qu’elle favorise un fonctionnement plus harmonieux du foie et de la vésicule biliaire que la Fumeterre favorise la digestion, limite la constipation ou les spasmes intestinaux et facilite le drainage des toxines. Les infusions de Fumeterre sont également conseillées pour lutter contre les nausées de la femme enceinte ou contre les migraines d’origine hépatiques, d’autant plus que c’est une bonne fluidifiante sanguine.
Alors, pour soutenir la vésicule biliaire, il est très intéressant d’utiliser la Fumeterre en infusion, car celle-ci contribue à la bonne hydratation nécessaire au fonctionnement du système tout en apportant les principes actifs des plantes directement dans le tube digestif.
On mélangera alors avec bonheur la Fumeterre au Chardon-marie, autre grande plante du foie et de la vésicule : la première sera plus stimulante et la deuxième plus drainante. Un petit conseil : aromatisez la avec miel de Romarin, histoire de goûter, sachant que le Romarin aussi est une bonne plante pour le foie, c’est tout bénéf ;)
Une infusion parfaite si vous avez fait quelques excès…
A préparer en mélange à parts égales, 3g par tasse, dans de l’eau bouillante, 10mn d’infusion, à raison de 1 tasse avant chaque repas pendant 21 jours. Notez que cette tisane a un goût très amer…
La Fumeterre est aussi très intéressante en cas de terrain lithiasique : s’il n’y a pas obstruction, la Fumeterre, en tant que cholagogue et amphocholérétique, va stimuler la production et l’évacuation de bile. Mais elle fait mieux que ça : elle a pour propriété de modifier la composition biliaire, ce qui a un effet bénéfique sur la lithiase biliaire, elle est donc très conseillée en prévention.
Elle peut aussi se montrer utile en accompagnement dans les cas de vidange perturbée de la vésicule biliaire (par une tumeur ou autre), dans les cas de cholécystite (inflammation de la vésicule biliaire) ou d’angiocholite (infection des voies biliaires). Attention toutefois : ces pathologies aiguës peuvent devenir graves et nécessitent impérativement une prise en charge médicale adaptée. Par contre, la Fumeterre peut être un soutien très intéressant, n’hésitez pas à en parler à votre médecin.
La Fumeterre est aussi préconisée en cas de symptômes post-cholécytectomie, c’est-à-dire après ablation de la vésicule biliaire.
3/ La Fumeterre est aussi une grande plante Détox, qui favorise l’élimination :
La Fumeterre soutient la détoxification générale de l'organisme en purifiant le sang, et en améliorant le transit, notamment quand la constipation est due à un manque de sécrétions biliaires, avec un effet de laxatif léger. Elle va donc être intéressante en cas de constipation, ou alternance constipation/diarrhée, bref tout ce qui relève des troubles intestinaux chroniques, comme le syndrome de l’intestin irritable, ou la colopathie fonctionnelle. Elle lutte aussi contre les parasites intestinaux et a une action anti-infectieuse et antifongique intéressante notamment en cas de Candida albicans.
Si on souffre du syndrome de l’intestin irritable avec un transit normal ou un peu ralenti, le phytothérapeute bien connu Éric Lorrain propose d’utiliser de concert la Fumeterre pour faciliter les sécrétions digestives, la Mélisse pour ses propriétés apaisantes et antispasmodiques, et le Pissenlit, riche en inuline à effet prébiotique.
La Fumeterre est d’ailleurs la plante dépurative du printemps par excellence !
Par contre, c’est une dépurative très puissante et on considère qu’il ne faut pas stimuler sans cesse les organes d’élimination.
Ainsi, dans le cas de la Fumeterre, on pratique donc généralement des cures d’une dizaine de jours, à raison de deux petites tasses d’infusion par jour.
D’autant plus que si elle a d’abord un effet dépuratif et tonique durant les 8 à 10 premiers jours, la Fumeterre a ensuite un effet calmant et légèrement somnifère. C’est pour cela que le père de la Phytothérapie Henri Leclerc la préconisait contre les maladies dues à une alimentation trop riche en cure de 8 jours, puis se reposer 10 jours. Par contre, comme anti-plhéthorique et calmante, il prescrivait une cure sans arrêt pendant 21 jours.
La durée d’une dizaine de jours pour la cure dépurative semble donc sage dans le contexte de la Fumeterre. Donc, on relance la machine digestive, puis on la laisse travailler seule, pour ne pas fatiguer la personne qui la consomme sur le long terme, sauf si l’effet désiré est un effet calmant et amaigrissant (on pense que la Fumeterre agit probablement sur les neuromédiateurs du centre de la satiété).
Pensez aussi qu’il ne faut pas non plus envisager une cure dépurative si vous vous sentez particulièrement fatigué par une série de maladies hivernales, ou après une longue convalescence, par exemple : il y a un moment pour rebâtir, et il y a un moment pour dépurer et drainer. La Fumeterre se prend plutôt lorsque vous vous sentez dans des états d’excès, avec une impression de lourdeur digestive constante et en cas d’apparition ou d’aggravation de maux de tête ou de problèmes de peau.
La personne qui bénéficiera pleinement de la Fumeterre est la personne “pléthorique”, forte, ayant tendance à manger beaucoup et à bâtir beaucoup, que ce soit de la masse musculaire ou osseuse (forte constitution, fort tour de poignet), ou de la masse adipeuse. Par son effet nettoyant, la fumeterre tendrait également à faire baisser le taux de cholestérol. Or, ce genre de personne a en général tendance à faire de l’hypertension essentielle et on connait le lien entre les deux…
Par contre, la Fumeterre est mal adaptée à la personne fine, frêle et ayant tendance à avoir souvent froid.
L’acupunctrice Yvanne Le Goff fait aussi le lien avec les tempéraments qui ont du mal à prendre des décisions au niveau émotionnel et qui procrastinent beaucoup : cela correspond souvent à un mauvais fonctionnement énergétique de la vésicule, celle qui tranche et prend la décision de libérer on non la bile. Dans ce genre de cas, cela peut donc valoir le coup de vérifier en acupuncture le bon fonctionnement énergétique de la vésicule…
4/ D’autre part, la Fumeterre est une plante légèrement sédative du Système Nerveux Central (SNC):
en raison de son activité sur les récepteurs GABA, ce qui va être intéressant particulièrement en cas d’insomnie d’origine digestive et de nervosité.
Ajouté à ses vertus cholagogues, cela permet à la Fumeterre de réguler les réveils nocturnes liés à la vidange de la vésicule, particulièrement lorsqu’on a tendance à se réveiller vers 3 heures du matin, car c’est souvent le moment où la vésicule biliaire doit se vider, produisant parfois un spasme du sphincter d’Oddi chez les personnes nerveuses. La Fumeterre est alors particulièrement recommandée car son effet légèrement sédatif et spasmolytique va apaiser le spasme et calmer le stress.
On peut alors prendre la Fumeterre en tisane, ou préférer la forme gélules ou extraction hydro-alcoolique, pour éviter le côté trop diurétique la nuit.
Tisane : à boire 30 minutes avant les repas principaux, durant 10 jours par mois sur deux à trois mois, au printemps mais aussi à l’automne, bien sûr.
Teinture mère : Prenez 30 à 50 gouttes dans un verre d’eau, environ 30 minutes avant les repas.
Gélules : Prenez une gélule dosée à 400 mg de poudre avant les repas principaux et une au coucher, avec un grand verre d’eau.
Attention, même si c’est une petite cousine du Pavot, la Fumeterre n’est pas considérée pour autant comme une plante calmante majeure : ce n’est pas une plante qui, comme l’Escholtzia ou la Valériane, va fournir un effet sédatif immédiat. En clair, ne prenez pas une infusion de Fumeterre ponctuellement en espérant améliorer la qualité de votre sommeil sur une nuit. Par contre, dans le cadre d’un « programme anti-insomnie » que vous travaillez sur le long terme, c’est une plante qui peut être intéressante à considérer et essayer…
5/ Au niveau externe, la Fumeterre aide aussi à retrouver une peau plus saine :
On retrouve cet éternel lien entre le foie et la peau : quand le foie est engorgé, c’est la peau qui trinque, donc quand on veut soigner la peau, on draine le foie, automatiquement !
En dermatologie, la Fumeterre est donc utilisée pour purifier la peau et traiter certains troubles tels que l'acné, le psoriasis, la perlèche et l’eczéma. On l’utilise aussi pour soigner les croûtes de lait chez les nourrissons, appliquée en lotion, ou éventuellement en infusion diluée dans le biberon (bon courage pour lui faire avaler…).
Elle est également conseillée en cas d'allergie ou d'intolérance alimentaire et de prurit, car elle a aussi des propriétés anti-histaminiques !
Cazin nous dit que c’est principalement contre les affections cutanées chroniques qu’elle a montré une efficacité incontestable. (Pour la petite histoire, la Fumeterre faisait partie des meilleurs traitements curatifs pour la lèpre).
La Fumeterre est particulièrement conseillée par Pierre Lieutaghi, célèbre ethno-herboriste, en cas d’eczéma suintant (utilisation traditionnelle en Haute-Provence). Ce qui correspond bien à la personnalité de cette plante qui, comme on l’a dit au début, est refroidissante et asséchante, donc qui agit plutôt sur des conditions humides et enflammées. Pour l’eczéma sec, on utilisera plutôt la Bardane qui est moins asséchante et plus huileuse.
C’est aussi le grand remède des dartres ! On applique une compresse imbibée de l’infusion sur la zone à traiter, 2 à 3 fois par jour, pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois.
En effet, bien qu’ayant une efficacité reconnue, la Fumeterre agit lentement pour les problèmes de peau. Il faut donc une utilisation prolongée de la plante, qui n’agit pas aussi vite que les médicaments. Elle agit plus en douceur, mais sur le long terme. Et il peut être intéressant alors d'agir simultanément en interne et en externe…
Mais de nos jours, qui montre assez de patience pour persévérer pendant plusieurs mois ?
6/ Autres effets intéressants : diurétique, stimulante cardiaque et respiratoire
La Fumeterre contribue au maintien d'une santé rénale normale : en effet, grâce à ses propriétés diurétiques, elle est utilisée en cas de rétention d'eau, d’œdème ou d'hypertension essentielle (souvent associée avec le Pissenlit dans ce dernier cas).
Sur le plan métabolique, cette fonction de protection hépatique et rénale rend aussi la Fumeterre intéressante dans un contexte de Diabète de type 2.
A faible dose, une de ses molécules principales, la protopine, a aussi un effet stimulant cardiaque et respiratoire : associé à ses vertus anti-histaminique, dépurative et sédative, cela fait de la Fumeterre une plante très intéressante en accompagnement de l’asthme, notamment. En cas de pollinoses, on l’utilise alors en infusion tout au long de la journée, ou en alcoolature, jusqu’à amélioration des symptômes.
Il ne faut donc pas limiter les indications de cette plante au simple cadre du système digestif…
PRÉCAUTIONS :
La Fumeterre est dépourvue de toxicité aux doses habituellement recommandées (dosage moyen quotidien 3 à 6 g). Par contre, compte tenu de sa richesse en alcaloïdes, c’est une plante puissante qui nécessite quelques précautions à fort dosage : il ne faut donc pas dépasser les doses conseillées.
Et surtout, on ne l’utilisera pas seule, ni pendant une longue durée.
En infusion, on privilégiera donc les associations avec d’autres plantes :
- en cas de problèmes digestifs ou hépatiques : mélisse, chardon-marie, artichaut, gingembre, curcuma et gentiane, desmodium, pissenlit, mélisse, boldo.
- en cas de migraines d’origine digestive : la grande camomille et la mélisse.
en cas d'eczéma et de dermatite : la pensée sauvage et la bardane.
En résumé, c’est une plante puissante à utiliser avec circonspection, sur le court ou moyen terme, jamais à long terme, d’autant plus qu’elle peut être désagréable à boire selon la personne. Si c’est le cas, elle passera mieux en alcoolature. Et même en alcoolature, il vaut mieux l’intégrer au sein d’un mélange.
La Fumeterre est déconseillée aux enfants de moins de 18 ans et aux personnes de constitution frêle.
Elle est contre-indiquée en cas de prise d'antihypertenseurs diurétiques, d’insuffisance hépatique grave, d’hépatite et d’obstruction des voies biliaires. Attention à son effet très stimulant sur le foie et les reins : à utiliser avec prudence en cas d’hyper ou d’hypotension.
La Fumeterre est légèrement hypnotique et sédative après 9 jours d'utilisation, prudence si ce n'est pas l'effet recherché.
SYMBOLISME
Le seul symbolisme relié traditionnellement à la Fumeterre est la CLARTÉ.
Comme la fumée grise qui se disperse et monte vers la lumière, la Fumeterre nous invite à clarifier nos sentiments et notre vision, à porter notre attention sur ce dont nous avons vraiment besoin, et ainsi à nettoyer notre confusion intérieure.
Comme la Fumeterre, nous pouvons nous ouvrir à notre face cachée, nos terres grises, et à les transformer en quelque chose de neuf et à nous ouvrir à la connaissance, car l’ombre est remplie de nos espoirs, de nos trésors et de nos mystères.
Alors, pour éclaircir le chemin et bien commencer l’année, vous prendrez bien une petite cure de Fumeterre ?
Références/sources :
- Virginie Missiaen, Herboriste Naturopathe
- Plantes et Santé
- Ambre Marsili, herbaliste et naturopathe
- Jesus Cardenas médecin
- Christophe Bernard, Althea Provence
- Petit Larousse des plantes qui guérissent, de François Couplan et Gérard Debuigne
- Du bon usage des plantes qui soignent, de Jacques Fleurentin
- École Lyonnaise des Plantes Médicinales
- 300 plantes médicinales, de CLaudine Luu
- site Luminessens
- Plantes occidentales et médecine chinoise, de Anne Vastel