Alchémille, plante des femmes et des alchimistes...

Alchémille, plante des femmes et des alchimistes...

C'est une humble plante des prés, perdue au milieu de l'herbe qui souvent la dépasse. Pourtant, ses vertus apaisantes et cicatrisantes méritent que l'on s'y arrête et qu'on apprenne à l'utiliser. 

L’alchémille doit son nom aux alchimistes qui recueillait la rosée dans ses feuilles : en effet, l'une des caractéristiques les plus frappantes de cette plante gracieuse est la manière dont ses feuilles, incurvées et plissées, sont capables de recueillir les gouttes de rosée : pendant la nuit, elles se replient, au matin elles révèlent leur trésor liquide, mélange de rosée de de l’eau secrétée par la plante. C’était, en tout cas pour les alchimistes une eau très pure, « l’eau céleste » dont ils avaient besoin pour leurs travaux et qui leur était absolument indispensable afin de parvenir à leur Grand Œuvre et produire la Pierre Philosophale.

Plus précisément, le mot alchemilla vient de l'arabe al kimiya, « médicament universel », car ils pensaient que l'eau que l'on recueillait de cette feuille était un médicament particulièrement puissant.

Il faut dire que depuis la nuit des temps, on a considéré que la rosée avait des propriétés magiques et cette faculté de recueillir la rosée a marqué les hommes en tous lieux : de la même manière, dans les pays celtes, le nom gaélique de l'alchémille est copan an driùch, "coupe à rosée".

L’aspect ample et élégant des feuilles vaut à l’alchémille son nom populaire de « Manteau de notre dame » : ce nom lui aurait été donné à cause de la ressemblance de ses feuilles avec un manteau ou une cape féminine.

Elle a beaucoup de noms : Patte de lapin, Pied de griffon, Pied de lion, Porte-rosée, Soubeviette.

 

BOTANIQUE

Alchemilla vulgaris fait partie de la famille des Rosacées : c’est une plante vivace, polymorphe, de 10 à 30 cm de haut, très commune dans les prés humides; elle pousse dans les bois, les prés et les pâturages humides. Elle est présente de l'étage collinéen à l'alpin. Originaire de tout l'hémisphère nord, on la rencontre dans toute l'Europe, en Asie et Amérique du nord.

Elle est reconnaissable par sa tige verte aux teintes rougeâtres et par ses feuilles circulaires, formant des lobes dentelés. Ses petites fleurs sont jaunes verdâtres. Beaucoup de variétés différentes : au-dessus de 1000 mètres d'altitude, elle est remplacée par une variété alpine.  

La raison de ce grand nombre de variétés tient à ce que chez ces plantes, un individu a la faculté de produire ses graines sans qu’il y ait fécondation : c’est ce que l’on nomme la parthénogenèse. De ce fait, on observe des lignées parallèles de types très légèrement différents les unes des autres.

Toutes les alchémilles semblent avoir les mêmes propriétés bien que les espèces montagnardes passent pour être les plus actives.

 

HISTOIRE

L'Alchémille a un passé prestigieux mais peu connu.

Dans la médecine antique, l’alchémille passait pour une plante sacrée à laquelle on prêtait de grandes vertus.

Plante du Nord aimant la fraîcheur et l'humidité, l’alchémille était sacrée chez les Vikings et a joué un grand rôle dans la magie herboriste scandinave. Sur les terres celtes, elle était très associée à la magie de la Fête de Beltaine, la fête du printemps.

Au Moyen Age, cette plante était déjà utilisée en phytothérapie, mais elle était alors censée... redonner leur virginité aux jeunes filles, légende qui a perduré fort longtemps : on dit, par exemple, qu'après le départ en 1871 des soldats prussiens, les femmes du Perche et d'Eure-et-Loir utilisèrent abondamment ce procédé.

L’alchémille était censée avoir des vertus magiques : avec les fleurs séchées d'alchémille, on fabriquait couramment des sachets destinés aux « vœux d'amour", elle servait aussi à contrer les sorts de « nouage de l'aiguillette » rendant l'homme incapable d'accomplir le devoir conjugal, en glissant quelques feuilles sous le matelas des amants.

On glissait aussi une feuille séchée et réduite en poudre dans des « bagues à poison » : portée au doigt, l'Alchémille était censée être très bon contre-poison, faire voir toutes les petites merveilles de ce monde et favoriser le sentiment amoureux.

Elle était aussi censée redonner de l'éclat aux seins flétris, puisque la plante était connue pour raffermir les tissus de l'appareil génital féminin en enveloppant celui-ci tel un manteau.

Plus proche de nous, l'alchémille apparaît en 1570 dans un traité d'Andrés Laguna de Segovia, un médecin, pharmacologue et botaniste espagnol qui la recommande en infusion pour soigner les fêlures et fractures chez les bébés et les jeunes enfants, mais aussi en poudre associée à du vin rouge pour soigner toutes sortes de blessures.

Et c'est en fait au début du XXe siècle que le prêtre et herboriste suisse Johann Künzle a démontré son utilité dans le soulagement des douleurs prémenstruelles, mais aussi dans la préparation de l'accouchement.

Depuis, de nombreuses études scientifiques int démontré que l’alchémille possède effectivement d’importantes vertus pour soulager les problèmes d’ordre gynécologique. Son effet est globalement «progestérone like» mais on ne connaît pas son mode d’action exact. Explication effet d’entourage.

L'alchémille a vu ses propriétés scientifiquement reconnues puisqu'elle fait partie des plantes médicinales inscrites à la pharmacopée française, c'est-à-dire dont la vente libre est autorisée par le Code de la Santé publique, pour ses vertus médicinales et non simplement culinaire.

 

CUEILLETTE

Dans l’alchémille, on utilise les parties aériennes qui deviennent extrêmement légères au séchage : feuilles terminales (mais sans leurs pétioles) et fleurs.

On cueille les feuilles tendres et jeunes, encore un peu fripées, au début du printemps (pour l’utilisation culainaire), jusqu’à la floraison, entre mai et septembre (pour l’utilisation médicinale, car c’est pendant la floraison, de mai à septembre, que la teneur en tanin est la plus forte).

Traditionnellement, on les cueille bien sûr, à l'aube, lorsque la rosée est encore mélangée avec le liquide qu'exsude la plante.

 

CUISINE

Les feuilles d’alchémille sont peu utilisées en cuisine. Dans le Dauphiné, on en mangait en potage, ou apprêtées comme des épinards.

Sinon, les jeunes feuilles peuvent étoffer les salades mais elles n’ont pas beaucoup de saveur et présentent une ­astringence qui n’est pas fort agréable (présence de tanins, caractéristiques de la famille des Rosacées), mais révèle la présence de nombreux anti-oxydants.

Il est donc préférable de les ­accommoder avec des ingrédients qui les relèvent – par exemple, de les cuire à l’eau pour les ramollir et de les mélanger avec une sauce blanche aromatique.

On l’utilise beaucoup plus au niveau médicinal qu’au niveau culinaire, quoi qu’il en soit.

 

PROPRIÉTÉS ET UTILISATIONS

L'alchémille est une plante typiquement destinée aux femmes puisqu'elle va aider à soulager des troubles tels que les affections gynécologiques ou les douleurs dues aux règles : dans les campagnes, c’était la plante qui permettait de « régler leurs saisons », c'est-à-dire à réguler le cycle menstruel.

En effet, l'alchémille vulgaire possède des propriétés astringentes (substance favorisant le resserrement des tissus), hémostatiques (anti-hémorragiques) et cicatrisantes. Elle possède des propriétés également dites lutéiniques ou " progesterone-like ", son action étant proche de la progestérone, donc hormonale. Par ailleurs, elle a une action calmante sur le système nerveux.

Sur le plan gynécologique, toutes ces vertus en font donc un très bon remède contre les syndromes prémenstruels, mais aussi lors de la préménopause, en cas de règles abondantes ou de cycles irréguliers, d'affections vaginales comme les pertes blanches, ou bien encore les saignements suivant l’accouchement. Par son effet tonique sur le muscle utérin, elle facilite l'accouchement (avant et après).

On la préconise aussi souvent en cas d’endométriose ou de fibrome utérin.

On l’associe souvent avec d’autres plantes des femmes : l’achillée en cas de règles abondantes, le gattilier en cas de règles irrégulières, le framboisier comme tonique utérin….

Elle s’utilise très simplement :

-       en infusion, à raison d'1 cuillère à soupe de plante sèche par tasse d'eau chaude, en laissant infuser 15 minutes. Ou 20 à 30g de plante par litre d’eau. Boire 2 à 3 fois par jour. En cas de troubles menstruels, prendre l'alchémille plutôt dans la deuxième partie du cycle (du 14e au 28e jour).

-       ou en teinture mère (En extrait hydro-alcoolique (teinture mère) : 20 à 30 gouttes dans un verre d'eau, 3 fois / jour).

On l’utilise aussi pour d’autres maux :

Grâce à ses propriétés astringentes et calmantes, elle est aussi utilisée en infusion en cas de troubles du transit : diarrhées chroniques, gastro entérites, stomatites…

Prise en bain de bouche, elle aide également à maintenir une bonne hygiène buccale et combat les infections de la bouche et de la gorge (aphtes, gingivites, angine).

En externe, l'alchémille aide aussi à la cicatrisation des plaies et ulcères cutanés, et s'avère aussi efficace contre les vergetures : on l’utilise en compresse (faire bouillir 40 g de plante sèche pour un litre d'eau froide. Infuser 15 minutes avant de filtrer. Laisser refroidir puis appliquer la compresse sur la zone touchée à l'aide d'un linge, 3 fois par jour).

De plus, l’alchémille a des propriété antioxydantes : les flavonoïdes qu’elle contient aident à maintenir une bonne circulation sanguine et à décongestionner, l'alchémille est donc conseillée pour soulager les personnes ayant les jambes lourdes (en infusion, ou simplement mêlée à l'eau du bain, à raison de 50g infusé ds un litre d’eau).

En compresse ou en lotion, elle lutte aussi contre la cellulite.

Parmi les autres vertus reconnues à l'alchémille, notons qu'elle est utile en cas d'angine, de céphalées et pour les personnes souffrant de rhumatismes.

Précautions d’emploi :

La consommation de cette plante peut augmenter le risque de constipation chez certaines personnes, compte tenu de ses propriétés anti-diarrhéiques, si elle est absorbée à fortes doses ou durant une période prolongée.

Du fait de son action proche de la progestérone, l'alchémille doit être utilisée avec beaucoup de précaution par toutes les personnes prenant un contraceptif oral, et pas pendant dans la grossesse.

 

SYMBOLISME

L’alchémille, liée à l’élément eau, à la magie douce et au féminin, nous parle de transformation : elle nous apprend à ressentir le lien à la terre et à notre essence : elle attire notre regard vers le sol par de petits scintillements.

Elle nous protège contre les influences extérieures et nous montre le chemin intérieur : elle nous apprend à écouter notre authenticité et à exprimer notre être le plus profond. C'est dans sa simplicité qu'elle développe sa force, sa vérité. Elle symbolise le mystère de la vie.

Comme cette petite goutte d'eau si délicate, elle vous donne la force d'être vous-même, conscient de votre individualité.

Elle est liée symboliquement à la création, au mystère de la vie et à la magie créative de l’anima : l’acte créateur des femmes qui font apparaître des choses depuis les profondeurs de leur univers intérieur, profond et tranquille.

Quand on se sent bloqué sur le plan créatif, on appelle l’alchémille, qui nous rappelle de chercher en nous-mêmes ce dont nous avons besoin, et d’oser plonger dans notre subconscient, en arrêtant de trop se préoccuper de ce que disent les autres, de ce qu'ils pensent ou de ce qui les intéresse, ce qui est souvent très dommageable au processus créatif. La vraie magie de l’alchémille se manifeste quand vous la laissez couler librement et sans rien attendre.

Elle nous permet d’affronter nos propres ombres de la foret sombre : bien que minuscule, la goutte de rosée agit comme une boule de cristal quand vous la regardez, révélant le monde entier.

Dans ce travail intérieur, l'Alchémille sera à vos côtés lorsque vous serez prête à mettre une couverture autour de vos épaules, à demander a protection et à entrer dans la forêt sombre de votre inconscient. Elle vous murmure : « Vous pouvez vous en sortir dans cette vie. Votre âme est pure et entière, et quelles que soient les souffrances ou les violences que le monde physique vous fait subir, votre esprit reste intègre. »

L'alchémille se montre particulièrement utile en cas de traumatisme, vous soufflant les noms des routes qui vous permettront de retrouver votre chemin et de sortir de cette forêt noire. Elle n'exige rien ; elle attend, sachant que vous allez trouver courage et détermination à l'intérieur de vous. Elle ne perd jamais sa foi en vous, en votre force - et avec son aide, vous non plus.