Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, je vais vous parler de choucroute, et puis de Gin, aussi ! Mais surtout d’une plante médicinale aux vertus attestées et pourtant très commune : le Genévrier. Les trésors exotiques, c’est génial, mais ceux qu’on trouve en bas de chez nous, c’est encore mieux, non ?
Ce petit conifère robuste peuple nos landes sauvages et nos montagnes depuis bien longtemps, les randonneurs le savent bien, eux qui se piquent parfois rudement à ses aiguilles acérées, il fait partie du paysage. Il est même tellement commun qu’on en oublie parfois ses précieuses propriétés médicinales. Et pourtant : purifiant, antiseptique, diurétique, anti-inflammatoire, antirhumatismal, carminatif, antifongique et antioxydant, le Genévrier renferme une puissance insoupçonnée…
BOTANIQUE
De son nom scientifique, le Genévrier s’appelle Juniperus communis, et c’est un arbuste de la famille des Cupressacées. Elle renferme un grand nombre d’espèces, mais on retiendra principalement 3 : le Genévrier commun (Juniperus communis), le Genévrier cade (Juniperus oxycedrus) et le Genévrier sabine (Juniperus sabina) qui lui, est toxique.
Il y a beaucoup de noms communs pour désigner le Genévrier : Poivre du pauvre, Pétron, Thériaque des paysans, Grassi, Jugnouré, Ragayou, Pecket (Wallonie). On l’appelle aussi Genièvre, ce qui est une francisation du mot poitevin « Genèvre ».
L’étymologie du mot juniperus est peu claire, il y a plusieurs hypothèses :
- la 1ere le ferait venir du celte gen « buisson », et prus « âcre »,
- selon d’autres auteurs, le mot serait en relation avec Junon, épouse de Jupiter et déesse de la fécondité, qui présidait aux mariages et aux accouchements, ce qui semble assez logique car le Genévrier était employé autrefois pour faciliter le travail de l'accouchement.
enfin, certains pensent que son nom est une référence aux termes junio, signifiant « jeune », et parere, « produire », probablement en référence à la capacité de l’arbre à produire des cônes à un jeune âge.
Le Genévrier fut une des premières plantes à croître en Europe occidentale après la période glaciaire : réputé pour sa croissance très lente, le Genévrier commun se distingue par sa robustesse et bat aussi des records de longévité : il peut vivre jusque’à 1 000 ans, et pousser à des altitudes allant jusqu’à 3 000 mètres. Dans ces conditions climatiques extrêmes, il présente souvent un port nain, formant une adaptation naturelle pour résister au froid et au fort vent. En général, le Genévrier est un arbuste dont la taille peut varier de 50 cm à 6 ou 7 m de hauteur, dans des conditions très favorables.
Le Genévrier commun pousse dans de nombreuses régions de l'hémisphère nord, depuis l'Arctique à l'Afrique. Il est très commun en France sur les coteaux secs car il aime les terrains crayeux et calcaires. Il a en général un tronc tordu, souvent rougeâtre qui s’exfolie, et des feuilles/aiguilles acérées, compactes et nombreuses, d’un vert bleuâtre caractéristique, qui ont une bande blanche distincte sur leur face supérieure.
Il faut donc être rusé pour accéder à ses baies parfumées : enfin, ses « baies »… Le Genévrier est un Gymnosperme, comme les pins, les sapins ou l’if : il ne produit pas de fleurs (possédant un ovaire qui entoure complètement les ovules) et ses baies sont en fait des « cônes charnus » (l’équivalent des pommes de pin) que l’on nomme « galbules » en botanique. Ces fausses « baies » sont de croissance lente : vertes au départ, elles ne mûriront que la deuxième année après la fécondation (qui a lieu en général entre avril et mai) et deviendront bleues/noires la troisième année, elles contiennent 3 graines et sont entourées d’une pellicule de cire brillante : c’est à ce moment-là qu’elles seront récoltées.
C’est très joli, ce mélange de couleurs : les rayures blanches, les baies vertes, bleues, noires, qui se côtoient à divers stades de maturité sur l’arbre…
Le Genévrier cade, principalement méditerranéen, se distingue facilement de son cousin commun par ses feuilles qui comportent deux bandes blanches longitudinales. De plus, ses baies sont de couleur brique à maturité… et beaucoup moins appréciables côté goût ! Elles peuvent même entrainer une forte diarrhée, contrairement au Genévrier commun, en raison de leur composition chimique différente, (utilisation culinaire déconseillée, donc). Le Cade prospère au soleil, mais tolère également la mi-ombre.
Attention : si vous voyez des feuilles en écailles, vous avez affaire au Genévrier sabine qui est toxique : on l’employait autrefois comme plante abortive, non sans accidents, parfois mortels.
Toutes les parties de cette plante exhalent lorsqu'on les brûle une odeur résineuse plus ou moins suave et aromatique, car elle est très riche en constituants aromatiques. Les baies renferment de nombreux principes actifs, notamment des tanins, des sucres, des résines, un principe amer appelé la junipérine, des diterpènes et une essence aromatique (vous l’aurez compris, on va donc pouvoir distiller une huile essentielle !).
HISTOIRE
Le Genévrier est connu pour ses propriétés médicinales depuis la Haute Antiquité : dans l’Égypte ancienne, ses baies étaient utilisées au cours du processus de momification et en tant que vermifuge.
Selon la tradition, Hippocrate aurait protégé la population d’Athènes contre des épidémies de peste et de choléra en faisant brûler du Genévrier dans les rues et les maisons, afin de purifier l’air.
Très tôt, on l’utilise aussi en menuiserie et en marqueterie, car le bois du Genévrier est incorruptible. D’ailleurs, seules les poutres du temple de Diane à Sagonte, qui étaient en bois de Genévrier, ont été miraculeusement épargnées, lors de la mise à sac du roi Hannibal de Carthage. Dans les pays celtes, on utilisait aussi les branches, mélangées avec de la bruyère et de l'argile, pour boucher les creux des murs. On façonnait des coupes et des bols dans du bois de Genévrier - car on trouvait que son essence conférait un "goût agréable" à tout ce qui était servi dedans.
De grandes figures de l’histoire, comme Caton l’Ancien, Dioscoride ou Pline l’Ancien, ont également reconnu et décrit les bienfaits des baies de Genièvre pour la santé : c’est même l’une des plus anciennes plantes dépuratives et diurétiques connues. On utilisait ses branches, arrosées de sel, pour frotter les parties du corps atteintes de douleurs rhumatismales, et on utilise déjà ses baies pour traiter les problèmes urinaires et lutter contre la toux.
Avicenne, le grand médecin arabe, l’employait quant à lui contre les calculs rénaux, pour purifier les bronches et le foie.
Le Genévrier est probablement le plus ancien des encens à brûler utilisés par les sorcières de la région de la Méditerranée : en effet, au début de notre ère, les sorcières italiennes et espagnoles en faisaient des fumigations sur des collines telluriques pour éloigner les envahisseurs barbares, lorsque ses rameaux étaient chargés de baies.
Au Moyen-âge, le Genévrier est également réputé contre les voleurs : cela date d’une légende autour de la fuite en Egypte. Il y a plein d’histoires de plantes autour de la fuite en Egypte, c’est marrant, mais globalement 2 catégories de plantes : celles qui ont aidé la Vierge Marie et l’enfant Jésus, et les autres : le Lin était un trouillard, le Genet et les pois chiches des traitres, alors que le Chardon-Marie et le Genévrier ont aidé la Madone à échapper aux soldats d’érode : ce dernier aurait ouvert ses bras épineux pour cacher l’enfant Jésus : refroidis par ses épines acérées et embrouillés par l’odeur forte de ses baies, les chiens romains seraient alors passés devant le buisson de Genévrier sans les trouver. Depuis, le Genévrier est un arbuste béni, et qui a la réputation d’éloigner les voleurs, et même de les obliger à rendre leur butin : en Allemagne, les gens invoquaient l’aide de Frau Wachholder, le génie du Genévrier, dont la réputation surpassait celle des gendarmes !
En même temps, essayez donc d’avancer au milieu d’un buisson de genévrier, c’est pas facile, faut être très bien équipé. alors, pour protéger votre maison, plantez donc des genévriers !
Dans le folklore populaire, les buissons de Genévrier ont toujours joué un rôle protecteur contre les forces surnaturelles : pour éloigner les mauvais esprits et surtout les sorcières, on disait qu’il suffisait d’avoir un Genévrier près de sa demeure. Car la légende raconte que les sorcières, avant de pouvoir jeter leur maléfice, étaient obligées de compter toutes les aiguilles de l’arbuste, tâche si ardue qu’elles perdaient toute notion de temps jusqu’à l’aube, moment où elles perdaient leur pouvoir.
Chez les Celtes, il est carrément considéré comme sacré : il est relié à Odin, Thor et Zeus, excusez du peu ! Et il est en général associé à l’esprit du Corbeau.
En Prusse, lorsque les enfants tombaient malades, les parents apportaient de la laine et du pain dans un bouquet de Genévrier, en engageant les mauvais esprits à manger, à filer, …et à oublier le petit enfant. En Russie, on dit que dès que les esprits malveillants s'approchent d’une maison et sentent le Genièvre, ils s'en éloignent.
La tradition des fumigations de Genévrier est longtemps restée très vivace : jadis, au matin de la nouvelle année, on brûlait du Genévrier dans les maisons d’Écosse pour les purifier, ainsi que leurs habitants. Dans certaines parties des Cornouailles et de la Bretagne, les feux de Beltaine (qui ont lieu le 1er mai) contenaient du Genévrier et avaient la réputation de purifier le bétail : on brûlait aussi les baies pour purifier les étables. On brulait aussi des rameaux de Genévrier dans les hôpitaux en raison des propriétés antiseptiques et désinfectantes de son huile essentielle.
Celle-ci était elle aussi déjà fort utilisée en médecine et en parfumerie : son arôme boisé et balsamique passe pour "masculin" et est idéal pour les après-rasages. Dans la médecine populaire de l'Europe centrale, cette huile essentielle était considérée comme une panacée pour la fièvre typhoïde, la dysenterie, le choléra et d'autres maladies liées à la pauvreté. D’où son nom de Thériaque du paysan (digression « thériaque » ?).
On utilisait aussi de l’huile de Cade pour les problèmes de peau, qui était obtenue en chauffant incomplètement le bois de Genévrier.
Mais on utilise aussi le Genévrier en cuisine : notamment Ecosse, pour aromatiser le Gin, mais aussi pour le fumage des poissons. On en faisaient aussi des « tisanes fortifiantes ».
L'huile essentielle étant par ailleurs abortive, comme on l’a déjà dit, on a longtemps fait de la publicité pour le Genévrier en l'appelant « l'ami des dames »… enfin ami délicat d’utilisation, je vous déconseille !
Les Hollandais faisaient eux aussi une espèce d’eau-de-vie avec les baies. C’est une plante qui était aussi très utilisée par les vétérinaires pour guérir les animaux.
De l’autre côté de l’Atlantique, en Amérique du Nord, les Indiens utilisaient le Genévrier commun de la même manière, pour lutter contre les maux d'estomac, les affections respiratoires ou pour accélérer un accouchement, mais le transformait également en boisson alcoolisée. C’est une plante sacrée, là aussi : car le fabuleux Oiseau-Tonnerre, créature légendaire des religions amérindiennes aiment, paraît-il, se percher dans ses branches.… Là-bas, on l’appelle aussi Cedar tree, ou Red Cedar, mais attention, c’est un faux ami : rien à voir avec nos Cèdres européens et africains. On utilisait sa fumée pour "honorer" les six premières pierres entrées dans la Hutte à Sudation qui représentent les grandes forces des Six Directions.
Le Genévrier faisait aussi partie des plantes dont on remplissait la Pipe Sacrée des Lakota (le fameux Calumet de la Paix) : il était utilisé pour apporter calme, acceptation et paix intérieure car les Amérindiens disent qu’il dissout les « formes pensées ».
Au 19eme siècle, encore récemment, le Genévrier a connu un certain succès grâce à la Cure de Kneipp, du nom de l’abbé Kneipp, qui était le pape des a médecine naturelle en Allemagne. Cette fameuse « neuvaine de Genièvre » était très facile à mettre en oeuvre : le premier jour, on mâche 1 baie de Genièvre, le deuxième deux… ainsi de suite jusqu’à neuf. Puis, on décroît à nouveau : cette cure de jouvence était considérée comme une très bonne cure détox, qui aidait à lutter contre l’engorgement des émonctoires et les effets du vieillissement.
Ensuite, le Genévrier est un peu tombé dans l’oubli, à part pour son utilisation dans la fabrication du Gin ou de la choucroute !
CULTURE ET CUEILLETTE
Le Genévrier poussant dans quasiment toutes les régions du monde, vous en trouverez probablement facilement près de chez vous : on peut cueillir les baies pratiquement toute l'année, à partir du moment où elles sont mûres. mais elles sont meilleures à la fin de l’automne, en octobre ou novembre.
Le Genévrier trouve aussi sa place dans tous les jardins grâce à son adaptation à la sécheresse, au froid et aux embruns. Attention par contre à ne pas vous faire vendre une variété ornementale stérile par la jardinerie, qui ne portera donc pas de baies !
Ce sont les baies qu’on utilise en général, on les cueille avec des gants épais, bien sûr ! Et même là, ça peut s’avérer compliqué.
Si vous avez des plants en abondance, vous pouvez aussi couper des branches et les taper dans un seau afin d’en faire tomber les baies, ou fouetter les branches au-dessus d’un parapluie renversé (méthode du regretté Pierre Lieutaghi, grand ethnobotaniste français).
Vous pouvez aussi utiliser les jeunes pousses séchées et coupées en petits morceaux, qui constituent un excellent thé selon le célèbre médecin phytothérapeute Valnet. On les coupe à la floraison, au printemps.
On peut aussi fabriquer une alcoolature médicinale avec les baies fraiches et les feuilles terminales : ça permet de couper les pointes des branches riches en fruits et feuilles, ce qui évite de nombreuses coupures, plutôt que de cueillir uniquement les fruits, et de bénéficier ainsi des principes actifs des deux !!
CUISINE
Ce sont les baies que l'on consomme généralement : elles ont un gout très aromatique, épicé et doux à la fois, presque sucré. Une légère amertume et un arrière-goût résineux complète le tableau et permettant d'atténuer les saveurs fortes du gibier à poil ou à plumes, c’est pourquoi elles accompagnent depuis longtemps ces aliments, que ce soit dans les ragoûts, ou tous les plats longuement cuisinés. Ainsi, avant de rôtir la viande, on peut la faire bouillir dans un bouillon auquel on a ajouté des feuilles de laurier, du citron et quatre à six baies de Genièvre. Elles vont parfumer subtilement la viande et relever les marinades, en apportant une touche aromatique boisée.
Et puis, les baies de Genièvre aident à la digestion des viandes grasses, alors raison de plus d’éviter de s’en priver ! C’est pourquoi traditionnellement, on prépare la choucroute avec des baies de Genièvre..
Les baies de Genièvre relèvent aussi très bien les pâtés végétaux de leur saveur sauvage. On utilise beaucoup le Genévrier en boucherie t en charcuterie : les baies dans les saucisses, le bois pour fumer la viande…
Les jeunes pousses tendres peuvent être ajoutées aux salades.
Par ailleurs, pour rafraîchir l'haleine, il n'y a rien de mieux que de croquer une ou deux baies fraîchement cueillies. Elles ont une saveur prononcée de conifère, qui peut étonner un peu de prime abord, mais on s'y fait très rapidement.
Dans le domaine des spiritueux, le Genévrier est indispensable dans la production du gin, se mariant traditionnellement avec des écorces d’orange, d’angélique et d’acore, mais on peut utiliser bien d’autres plantes pour aromatiser son Gin, qui tire son nom de la plante !
————-
RECETTE DU GIN :
Etape 1 : Achat d’une vodka avec 50% de teneur en alcool
Etape 2 : Infusion avec les baies de Genièvre
Etape 3 : Ajoutez les aromates
Etape 4 : Dilution et embouteillage
Les baies de Genièvre restent l’ingrédient principal de l’infusion du gin.
Pour cela il vous suffira de vous munir d’un entonnoir (toujours pratique).
En général vous pouvez compter 25 grammes de baies de Genièvre pour 70 centilitres de vodka. L’idéal sera bien sûr de prendre des baies de Genièvre fraîche puisqu’elles dégageront plus de saveurs et d’huiles dans votre gin.
Si vous écrasez les baies de Genièvre avant de les infuser, une trentaine de minutes peuvent suffire pour l’infusion. Si vous les laissez fraîches tel quelle, vous pouvez les laisser infuser 24 heures selon votre goût.
A savoir : plus vous laissez les baies de Genièvre s’infuser, plus le goût de votre gin aura tendance à se tourner vers le boisé.
————-
Il existe bien d’autres recettes d’alcools aromatisés aux baies de Genièvre : bières, eaux-de-vie…
On trouve aussi une recette de sirop de Genièvre : deux litres d'eau et une tasse à thé de baies : réduire à un litre ; ajouter un kilo de sucre ; réduire à nouveau à un litre ; en prendre un petit verre tous les jours, pour un effet tonifiant et détoxifiant.
PROPRIÉTÉS ET UTILISATIONS
Le Genévrier est une plante au tempérament réchauffant et asséchant.
Vous avez l’habitude maintenant de m’entendre parler du « tempérament » des plantes : parce que c’est vraiment la clé principale qui va permettre de déterminer son utilisation : le Genévrier, avec son tempérament « réchauffant », est une plante qu’on va utiliser plus particulièrement dans des problématiques considérées comme « froides », qu’il va réchauffer, c’est-à-dire des pathologies anciennes ou chroniques, et pas des inflammations aigües.
Pareil pour les problématiques “humides” avec rétention de liquide ou sécrétions lentes de mucus qu’on retrouve dans les inflammations chroniques ( et non aigües).
Il est d’ailleurs intéressant de noter que le célèbre médecin du 19eme siècle Cazin recommande le Genièvre pour ceux qui habitent dans des régions humides et froides afin de se protéger contre les maladies infectieuses. Cela colle bien avec son tempérament énergétique ! C’est intéressant de toujours garder cela en tête pour identifier dans quels cas le Genévrier sera plus intéressant qu’une autre plante aux propriétés similaires, d’autant plus qu’il a beaucoup de propriétés…
1/ Le Genévrier est une puissante plante diurétique
Cet effet est dû principalement à la présence de terpénoïdes dans ses baies, très riches en huiles essentielles (pinènes, cadinène), qui stimulent les reins et favorisent l’élimination de l’eau et des toxines de l’organisme.
On l’utilise donc dès qu’il y a rétention d’eau, dès que le corps à du mal à évacuer un excès d’eau, en particulier dans la partie inférieure du corps (cuisses, chevilles, pieds), d’après l’herboriste américain Matthew Wood.
Le Genévrier est très efficace (+++) pour prévenir et réduire les oedèmes dûs à une accumulation d’eau dans l’organisme, même en cas d’oedème généralisé, d’autant plus qu’il a aussi une action anti-inflammatoire.
Il est aussi utilisé en cas d’hypertension artérielle due à un excès de volume liquidien.
On va bien sûr aussi l’utiliser pour toute problématique qui nécessite d’augmenter la diurèse, c’est-à-dire d’augmenter le volume d’eau traité par les reins pour nettoyer et évacuer : par exemple, en cas d’infection urinaire, ou pour faciliter le passage de petits calculs rénaux.
Si on est sujets aux calculs, on pourra aussi faire des cures régulières d’HE de Genévrier : 1 à 2 gouttes, 3 fois par jour, dans 1 cuillère à café d’huile d’olive, pour une cure ne dépassant pas 7 jours consécutifs. La prise se fait de préférence le soir, période durant laquelle l’activité des reins est plus marquée. Cette méthode avec l’huile essentielle contribue à favoriser la diurèse nocturne et aide ainsi à prévenir la formation de calculs rénaux.
En cas de troubles urinaires simples type cystite, on peut tout simplement se faire une décoction de baies : 10 g de baies pour 750 ml d’eau bouillante, laisser bouillir 20 minutes et filtrer. Boire 2 ou 3 tasses par jour.
2/ Le Genévrier a aussi une action antiseptique
Mais là où le Genévrier va apporter un sacré coup de pouce par rapport à d’autre diurétiques, c’est que, grâce à sa richesse en composés phénoliques (géraniol, acide caféique), c’est un très bon désinfectant du système urinaire, c’est même l’un des antiseptiques urinaires les plus puissants, et l’une des seules à pouvoir faire la différence en cas d’infection urinaire résistante aux antibiotiques (on l’utilise alors sous forme d’alcoolature, plus puissante et complète que la décoction de baies), ou qui deviennent chroniques ! Car c’est un anti-microbien à large spectre, efficace contre différents agents pathogènes comme les bactéries, les virus ET les champignons.
Dans ce genre de contexte, on l’associe en général à la Busserole, la bruyère cendrée, le karkadé, ou le thym, car elle ne remplacera pas les autres plantes, mais elle apportera le petit plus nécessaire pour passer à l’efficacité supérieure…
On l’utilise aussi au niveau de la sphère vaginale chez les femmes, en cas de pertes blanches (leucorrhées), par exemple, pour son action anti-infectieuse. D’ailleurs, le Genévrier était traditionnellement utilisé en cas d’absence de règles ou de règles douloureuses : elle n’est pas aussi efficace que l’armoise commune pour l’aménorrhée ou l’achillée millefeuille pour la dysménorrhée, mais si on n’a que ça sous la main, c’est toujours bon à savoir…
Traditionnellement, on utilisait d’ailleurs l’infusion ou la décoction de baies de Genévrier pour nettoyer et désinfecter les plaies et les coupures, pour les soins bucco-dentaires, les soins post-opératoires et les mycoses.
3/ Le Genévrier est un expectorant et fluidifiant bronchique
De par sa richesse en résines, le Genévrier est un excellent ami de la zone ORL, en particulier des bronches et de la gorge. Le Genévrier est très indiqué pour les enfants fragiles, sujets au mal de gorge et au rhume, car c’est un expectorant doux, en plus d’être un désinfectant pulmonaire efficace (toujours ce côté antiseptique !). De plus, c’est aussi un fluidifiant bronchique, donc très utile sur les toux grasses. LE Genévrier est souvent associé dans ce type de cas avec d’autres plantes bronchiques comme l’hysope, le thym ou le marrube, les bourgeons de Pin.
On fait traditionnellement un sirop avec ses baies très riches en huile essentielle, c’est très efficaces pour les maux de gorge et les extinctions de voix, mais on peut aussi l’utiliser en inhalation humide dans les cas d’infections respiratoires rebelles ou chroniques, en particulier si vous habitez dans une région froide et humide.
Vous pouvez penser au Genévrier quand il y a un reste d’infection qui traine, un organe fatiguée et « froid », quand on a l’impression que les symptômes stagnent un peu : par exemple, un toux grasse qui ne s’en va pas complètement, une fatigue qui ne s’en va pas à la convalescence… D’autant plus que le genévrier est un bon tonique, particulièrement pour les enfants, mais ça marche avec les convalescents de tous âges, hein, les adultes aussi ! Vous pouvez l’utiliser en olfactothérapie pour bénéficier de son aspect tonique et anti-fatigue.
Pour renouveler l'air de la maison, vous pouvez faire brûler quelques baies dans un bol en céramique ou une coupelle métallique : ça parfumera délicieusement l’air, en plus de désinfecter l’atmosphère ! Ou bien en diffusion atmosphérique : 7 gouttes d’HE de Genévrier, 7 gouttes d’HE de romarin et 12 gouttes d’HE de mandarine rouge. Diffusez cette préparation pendant dix minutes toutes les heures.
4/ Le Genévrier est une grande digestive : stomachique, apéritive, détoxifiante, antidiabétique…
Voici un autre domaine où le Genévrier excelle ! en eflet, les composés actifs présents dans les baies, comme les monoterpènes et les sesquiterpènes, stimulent l’appétit et aident à réguler la production de sucs gastriques, ce qui favorise une meilleure digestion, en particulier en cas de plats un peu lourds, gras ou denses, avec des protéines, du chou ou des haricots. Ce n’est pas pour rien qu’on l’utilise pour aromatiser la choucroute !
En plus, cette plante favorise l'élimination des gaz, car son huile essentielle élimine certaines bactéries et levures responsables de la formation des gaz… Utilisez-la si vous avez l’impression que la digestion stagne pendant des heures au moindre écart alimentaire, avec des douleurs intestinales et une forte production de gaz. Le Genévrier est particulièrement recommandé chez les personnes âgées car les sécrétions gastriques diminuent avec l’âge. Il est efficace aussi bien que la fermentation des glucides (colon droit) que sur la putréfaction des protéines (colon gauche).
Au final, on l’utilisera donc aussi bien en cas de fermentation intestinale, de dyspepsie que d’anorexie ou d’inappétence. Pour relancer la digestion, on l’associe avec succès à la Gentiane, en prise 10 mn avant le repas, sous forme d’alcoolature diluée dans un peu d’eau (à faire pendant plusieurs semaines car relancer la machine prend un peu de temps). C’est la combinaison des deux qui fera vraiment toute la différence : contrairement à d’autres, le Genévrier est une plante qui aime travailler en équipe !
Si c’est plus pour calmer crampes et flatulences, décalez la prise après le repas, plutôt.
NB : Si vous préférez les tisanes : infusez (ou décoctez, encore mieux !) 1 cuillère à café de baies de Genièvre broyées pendant 10 à 20 minutes dans 150 ml d’eau bouillante puis filtrer ; et buvez-en de 1 a` 3 tasses par jour avant les repas (ou 20 à 30g par litre).
Le Genévrier est aussi un bon antidiabétique : de nombreuses études attestent que ses baies sont capables de faire baisser les taux de glucose sanguin, par une simple décoction, qui améliore l'absorption périphérique du glucose et stimule la sécrétion d’insuline.
Gestion de la glycémie : moudre chaque jour une dizaine de baies et les absorber avec de l’eau ( d’après Valnet).
Sous forme de bourgeon, le Genévrier est aussi très intéressant, car il travaille autant sur la sphère digestive que sur la sphère rénale : en effet, les jeunes pousses utilisées en gemmothérapie ont un effet tonique global et dépuratif puissant sur les reins et sur le foie, sur lequel elles ont aussi un effet hépato-protecteur, et même régénérant. Elles favorisent la destruction de l’acide urique, et une meilleure élimination du cholestérol et du sucre en excès dans la circulation sanguine. Ainsi, les jeunes pousses de Genévrier seront particulièrement utiles aux personnes en surcharge métabolique ou ayant tendance à faire des excès sur le plan alimentaire. De plus, son action conjointe sur le foie et le rein est aussi un atout précieux pour favoriser le processus de purification du sang en accompagnement des chimiothérapies, d’hépatite ou de cirrhos, quand la cellule hépatique est attaquée.
C’est un bourgeon qu’on associe très bien avec les bourgeons de Romarin et de Noyer : le mélange permet de restaurer les fonctions du trio foie/pancréas/intestins (cure de dix à vingt jours en général).
5/ Le Genévrier a des vertus anti-rhumatismale, anti-inflammatoire, anti-arthosique, antalgique et antigoutteuse
Là, ce sont les les flavonoïdes, les lignanes et les coumarines contenues dans les baies de Genévrier qui sont mises à profit dans ce genre de cas.
On peut l’utiliser aussi bien en interne qu’en externe : en application locale, l'huile essentielle de Genévrier permet de soulager les douleurs musculaires et articulaires en général (rhumatismes, arthrose, arthite, polyartrhite, sans oublier la goutte), car elle évacue l’acide urique et autres toxines responsables des douleurs articulaires, et a aussi un effet antalgique. Elle diminue ainsi les douleurs dues aux névralgies, aux néphrites ou aux sciatiques, tendinites…
Dans ce genre de cas, si vous en avez la possibilité, préférez l’huile essentielle de distillation des rameaux, et non des baies : encore plus complète en terme d’effet anti-inflammatoire et antalgique que celle des baies ! L’huile essentielle sera utilisée entre 3 et 20% dans une huile végétale de qualité, pour bénéficier de ses effets apaisants, en faisant des frictions locales 2 ou 3 fois par jour.
Le bain aux baies est une bonne voie d’utilisation si vous en avez la possibilité : mélangez 3 cuillères à soupe de baies dans un 1 l d’eau, faites bouillir 10 minutes, laissez infuser 10 minutes, puis filtrez et versez dans l'eau du bain.
Version pour les pressés : jetez une bonne poignée de baies moulues dans l'eau chaude du bain, et hop !! Ou bien mélangez 10 gouttes d’HE de Genévrier dans une base neutre ou un gel douche et incorporez le mélange dans l’eau de votre bain, tout simplement.
Le fondateur de la phytothérapie, Henri Leclerc la combine souvent avec la Prêle pour les arthritiques dont la fonction rénale a besoin d’être stimulée, car cette dernière est aussi une excellente diurétique, mais en plus elle est riche en silice et apporte donc l’un des matériaux essentiels à la construction des os et des cartilages. Sur du long terme, la cure de Genièvre/Prêle a pour effet d'augmenter la mobilité des membres ou des parties atteintes et d'atténuer leur raideur, tout en limitant le risque de formation de nouvelles lésions. Toutefois, ce traitement n'est efficace que lorsqu'on lui reste fidèle et qu'on le suit année après année.
Pour les personnes ayant une fragilité articulaire, la cure de Genièvre est donc à l'automne ce que la cure de Bouleau ou de Pissenlit est au printemps : un incontournable !
D’ailleurs, le Genévrier fonctionne très bien aussi avec le Bouleau, et le Cassis, pour démultiplier les aspects dépuratif et anti-inflammatoire.
6/ Le genévrier a une action sur la sphère cutanée :
Dans ce cas, on préférera travailler avec le Genévrier Cade.
Son huile essentielle est utilisée pour lutter contre l'acné, les dermatites, l’eczéma ou le psoriasis, dont il décape très bien les lésions. Elle permet de rééquilibrer les cuirs chevelus à problèmes. On l'intègre dans son shampoing à hauteur de 2%, ou on en ajoute quelques gouttes durant le lavage, tout simplement.
On recommande aussi de masser les zones concernées 2 fois par jour, jusqu'à amélioration de l'état de la peau. Dans ces cas, l'huile essentielle de Genévrier peut être associée à d'autres huiles essentielles, bien sûr, pour une action plus complète.
On l’utilise aussi en cas d’impétigo ou de teigne (mycose du cuir chevelu), ou pour se débarrasser de certains parasites externes (n’oubliez pas qu’elle était très utilisée par les vétérinaires !). Mme Mulot, une des dernières herboristes françaises, préconisait l’huile de Cade pour débarrasser sans dommage les animaux des tiques, par exemple.
Pour lutter contre la cellulite, on peut masser les zones concernées avec 5 ml d'huile essentielle de Genévrier mélangés à 95 ml d'huile d'amande douce.
enfin, au niveau émotionnel, nous retrouvons toujours le Genévrier comme « purificateur » : il va aider la personne qui le souhaite à se libérer de schémas ou de ruminations obsédantes. Il la protège également de ses excès de pensées en général. En olfactothérapie, l’HE de Genévrier calme l’agitation, apaise les tensions et, plus généralement, accompagne le retour de l’harmonie dans un groupe...
7/ Précautions à prendre
C’est une plante qu’on utilise en général sur de courtes périodes (6 semaines max) et à une posologie raisonnable et adapté à l’état de la personne (15 baies max par jour en ingestion). C’est ce que faisaient sagement la tradition en conseillant une prise progressive (Cure de Kneipp).
Mais elle n’a pas d’effet néphrotique démontré, contrairement à ce qu’on a cru à une époque. Attention seulement en cas d’insuffisance rénale grave : là, on évite bien sur, car il ne faut pas sur-stimuler un organe déjà fragilisé, c’est du bon sens…
En cas d’usage prolongé ou de surdosage, ça peut provoquer une odeur de violette dans les urines peut apparaître ce qui indique une irritation rénale, avec albuminurie et hématurie, ou une accélération du rythme cardiaque.
Enfin, n’utilisez pas le Genièvre si vous êtes enceinte (il stimule les contractions utérines) ou si vous allaitez.
SYMBOLISME
Le Genévrier porte 3 symboles différents :
il est avant tout un symbole de Protection et de Secours, comme ses feuilles acérées et son odeur qui protègent ceux qui viennent lui demander asile, lièvres, grives ou toute vie pourchassée.
Par sa parure constante, verte ou bleue, Genévrier symbolise aussi l’Immortalité et la longévité. D’autant plus que son odeur puissante nous emmène de la Terre (résine) au Ciel : ainsi, sa verticalité nous mène dans le monde des étoiles. Les Amérindiens en faisaient parfois le poteau central de la Danse du Soleil, car il symbolisait pour eux le tunnel qui permet à l'être descendu dans la matière de refaire en sens inverse le chemin vers la Lumière, qui éloigne le doute, la peur, ces « fausses émotions », et aide à « relever » les danseurs… Il est le gardien de la vibration.
enfin, le Genévrier symbolise la force et la sagesse : il nous rappelle qu’il est possible de s‘épanouir partout même dans des conditions très difficiles, du moment qu’on dispose de solides racines ! On dirait parfois qu’il sort des rochers et qu’il a créé lui-même les fissures dans la roche !! L'un des secrets de la longue vie est d'apprendre à combiner la spontanéité juvénile de l'enfance et la sagesse de l’âge, comme il combine les petites racines près de la surface pour capter l’eau, et une grande racine centrale pour s’ancrer solidement à la roche.
C’est la « sagesse des racines », qui nous apporte la force et la confiance.
Alors, la prochaine fois que vous croiserez un Genévrier sur le chemin, vous croquerez bien une petite baie ??
Références/sources :
- Christophe Bernard Althea Provence
- Petit Larousse des plantes qui guérissent François Couplan et Gérard Debuigne
- Du bon usage des plantes qui soignent de Jacques Fleurentin
- Paulette Vanier, rédactrice Passeport Santé
- Luminessens
- Virginie Missaein, herboriste naturopathe
- Guillaume Gérault naturopathe, nutrithérapeute et aromatologue, directeur de l’École française d’aromathérapie/intégrative
- Claudine Luu, herboriste et praticienne MTC
- Secrets d’une herboriste Marie-Antoinette Mulot
- Plantes occidentales et médecine chinoise, Anne Vastel